André Chénier
Auteurs français ► XVIIIe siècle ► vous êtes ici
Auteurs français
André Chénier
1762 – 1794
Ce qui se dit en trois mots n’est jamais si bien dit en quatre ; et un bon livre n’est pas celui qui dit tout, mais qui fait beaucoup penser.
(André Chénier, Œuvres inédites)
Sommaire
André Marie de Chénier, dit André Chénier, est un poète français classique, mais précurseur du romantisme, qui est mort en martyr de la Terreur révolutionnaire. Il est né le 30 octobre 1762 à Constantinople et mort guillotiné à Paris le 25 juillet 1794 à 31 ans.
L’œuvre inachevée de ce jeune poète du XVIIIe siècle, publiée progressivement à partir de 1819, a fait de lui une figure majeure de l’hellénisme en France. Quelques vers qui lui étaient échappés pendant sa vie, ou qu’on avait publiés depuis sa mort, avaient donné une idée très avantageuse de son talent, et excité les plus vifs regrets de la perte de ce poète, mort à un âge où ce talent donnait de belles espérances et promettait un poète remarquable par une verve féconde et une originalité brillante.
La vocation poétique
Né à Constantinople, où son père était consul de France, André Chénier, vient habiter très jeune à Paris avec sa mère et ses frères.
Passionné par la Grèce antique, il fait de brillantes études au collège de Navarre de 1773 à 1781. Sa vocation poétique s’éveille de bonne heure — ainsi que celle de son frère, Marie-Joseph. Dans le salon maternel, il fréquente le poète Lebrun-Pindare, le peintre David et plusieurs savants.
L’adolescent lit et étudie avec passion et esquisse déjà les Élégies. Après une très brève carrière militaire avortée en 1782 puis un voyage en Italie et en Suisse, il achève ses Bucoliques (1785-1787) et accepte un emploi de secrétaire d’ambassade, à Londres en 1787. Il souffre du dépaysement comme d’un véritable exil et se consacre à de vastes projets poétiques.
Il écrit l’Invention, exposé de sa nouvelle doctrine poétique, et ébauche deux épopées, L’Hermès et L’Amérique, restées inachevées. Le premier de ces deux longs poèmes, L’Hermès, devait exprimer deux tendances du XVIIIe siècle, l’enthousiasme pour la science et la foi dans le progrès. Le second, L’Amérique, devait relater les explorations ayant conduit à la découverte du Nouveau Monde, dépeindre le continent américain et les mœurs de son peuple. Mais les circonstances ne permettent pas à André Chénier de mener à bien ce projet didactique et scientifique.
L’engagement politique et la poésie satirique
À son retour, en 1790, il participe avec enthousiasme au mouvement révolutionnaire. Il fonde avec les frères Trudaine la Société de 1789 et célèbre dans une ode le serment du Jeu de paume. Mais il reste cependant modéré, protestant contre les excès des Jacobins et s’indignant de l’accueil triomphal que reçoivent à Paris des soldats mutinés, les Suisses du régiment de Châteauvieux. Il participe notamment à la défense de Louis XVI avec Malesherbes et devient suspect après l’exécution du roi.
Il se retire à Versailles et rédige des odes en l’honneur de sa compagne Françoise Le Coulteux, qu’il nomme « Fanny ». De retour à Paris, il est arrêté en mars 1794 et emprisonné à Saint-Lazare. Il y écrit alors La Jeune Captive et les Iambes satiriques, dans lesquels il attaque explicitement la tyrannie jacobine. Il parvient à faire passer les manuscrits à son père en les dissimulant dans du linge. Dans les cent vers de ses Iambes, il transpose en français le rythme iambique illustré jadis par le poète grec Archiloque et lui donne des accents satiriques qui ponctuent une critique virulente du jacobinisme.
Condamné à mort comme « ennemi du peuple », il est guillotiné le 25 juillet 1794, deux jours avant la chute de son principal ennemi, Robespierre. Ses dernières paroles prononcées avant de monter sur l’échafaud en s’adressant au poète Jean Antoine Roucher ont été « je n’ai rien fait pour la postérité » et de rajouter (se désignant la tête) : « Pourtant, j’avais quelque chose là ! » ou « C’est dommage, il y avait quelque chose là ! ». Son corps est jeté avec 1 300 autres victimes de la Terreur et de la guillotine place de la nation dans une fosse commune du couvent des chanoinesses devenu le cimetière de Picpus à Paris.
L’apport théorique et esthétique
Mort à 31 ans, André Chénier laisse derrière lui une œuvre abondante et un style très apprécié.
Son œuvre, classique dans la mesure où son inspiration et sa forme sont empruntées à la Grèce antique, marque un renouveau considérable par la sensibilité et le lyrisme civique enthousiaste qui l’animent. Ce paradoxe s’exprime dans son célèbre mot d’ordre : « Sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques. »
André Chénier réhabilite l’inspiration humaniste, l’enthousiasme créateur cher à Ronsard, à un moment où la poésie est avant tout considérée comme un exercice formel. Mais il maîtrise aussi la versification et emprunte à la poésie grecque la musicalité de ses vers et sa beauté plastique. Dans certains de ses plus beaux poèmes comme La Jeune Tarentine, il multiplie les rejets et les coupes expressives pour parvenir à des mouvements mélodiques qui laissent transparaître sa mélancolie.
Ses poèmes, inédits de son vivant, à l’exception du Jeu de Paume et de l’Entrée triomphale des Suisses révoltés du régiment de Châteauvieux sont publiés en 1819 par Henri de Latouche, et suscitent aussitôt l’enthousiasme de la jeune génération romantique qui salue l’alliance remarquable de l’inspiration sincère et du culte de l’art, « une poésie nouvelle qui vient de naître » (Victor Hugo). L’influence de Chénier est particulièrement sensible chez Alfred de Vigny (La Fille de Jephté), chez Victor Hugo (Les Orientales) ou chez Alfred de Musset (La Nuit de mai) ainsi que chez les parnassiens qui voient en lui un précurseur.
Un opéra du compositeur italien Umberto Giordano, en 1896, retrace la vie du jeune poète martyr. Il est, avec Chatterton et Gilbert, l’un des trois auteurs « maudits » présentés par le Docteur Noir dans le Stello d’Alfred de Vigny.
📽 15 citations choisies d’André Chénier
- Tout mortel se soulage à parler de ses maux.
- Les destins n’ont jamais de faveurs qui soient pures.
- Plus une femme aime son mari, plus elle le corrige de ses défauts ; plus un mari aime sa femme, plus il risque d’augmenter ses défauts.
- L’art ne fait que des vers, le cœur seul est poète. (Élégies)
- Les amants malheureux vieillissent en un jour. (Élégies)
- Avant de la quitter, il faut user la vie. Le moment d’être sage est voisin du tombeau. (Élégies)
- Trop de désirs naissent de trop de force. (Le Jeu de paume)
- L’obstacle nous fait grands. (Le Jeu de paume)
- Jusqu’à la mort nous espérons toujours. (L’Aveugle)
- Travaille. Un grand exemple est un puissant témoin. Montre ce qu’on peut faire en le faisant toi-même. (L’Invention)
- Qui prévient le moment l’empêche d’arriver. (Damalis)
- Ce qui se dit en trois mots n’est jamais si bien dit en quatre ; et un bon livre n’est pas celui qui dit tout, mais qui fait beaucoup penser. (Œuvres inédites)
- Détache la ceinture à la belle étrangère, Et la vierge en ses bras devient épouse et mère. (Les Bucoliques)
→ Autres citations d’André Chénier.
Œuvres
- Les Bucoliques, publication posthume (1819)
- Abel (Élégies)
- À Charlotte Corday (Hymnes et Odes)
- À compter nos brebis je remplace ma mère (Poésies Antiques)
- À de Pange aîné (Épîtres)
- À de Pange (Élégies)
- À Fanny (I) (Élégies)
- À Fanny (II) (Élégies)
- À Fanny (III) (Élégies)
- À Fanny malade (Élégies)
- À l’hirondelle (Poésies Antiques)
- À la France (Hymnes et Odes)
- Ah ! je les reconnais, et mon cœur se réveille (Élégies)
- Ah ! portons dans les bois ma triste inquiétude (Élégies)
- Ah ! prends un cœur humain, laboureur trop avide (Poésies Antiques)
- Amymone (Poésies Antiques)
- Arcas et Palémon (Idylles)
- Art d’aimer, fragment III (Poèmes)
- Art d’aimer, fragment II (Poèmes)
- Art d’aimer, fragment VIII (Poèmes)
- Art d’aimer, fragment VI (Poèmes)
- Au chevalier de Pange (Élégies)
- Aux frères de Pange (Élégies)
- Bacchus (Poésies Antiques)
- Bel astre de Vénus… (Poésies Antiques)
- Chrysé (Poésies Antiques)
- Comme un dernier rayon, comme un dernier zéphyr (Dernières poésies)
- Épigramme d’Evenus de Paros (Idylles)
- Épilogue (Poésies Antiques)
- Euphrosyne (Poésies Antiques)
- Fille du vieux pasteur, qui d’une main agile (Poésies Antiques)
- Hercule (Poésies Antiques)
- Hylas (Poésies Antiques)
- Il n’est donc plus d’espoir, et ma plainte perdue (Élégies)
- Il n’est que d’être roi pour être heureux au monde (Élégies)
- Innaïs (Idylles)
- J’étais un faible enfant qu’elle était grande et belle (Poésies Antiques)
- Je sais, quand le midi leur fait désirer l’ombre (Poésies Antiques)
- Jeune fille, ton cœur avec nous veut se taire (Élégies)
- L’Amérique (Poèmes)
- L’amour endormi (Poésies Antiques)
- L’amour et le berger (Poésies Antiques)
- L’amour laboureur (Poésies Antiques)
- L’art, des transports de l’âme est un faible interprète (Élégies)
- L’Oaristys (Idylles)
- La jeune captive (Dernières poésies)
- La jeune L
- La jeune Locrienne (Idylles)
- La jeune Tarentine
- La liberté (Idylles)
- L’aveugle (Idylles)
- Le jeune malade (Idylles)
- Le mendiant (Idylles)
- Lydé (Idylles)
- Mnazile et Chloé (Idylles)
- Néère (Idylles)
- Sur un groupe de Jupiter et d’Europe (Idylles)
- Tout hommes a ses douleurs. Mais aux yeux de ses frères (Élégies)
Articles connexes
- Auteurs du XVIIIe siècle.
- Le pré-Romantisme et le Romantisme.
- Le Parnasse.
- Genre littéraire : La poésie.
- L’épigramme.
- Le genre poétique.
- L’Ancien Régime au XVIIIe siècle.
- La Révolution française.
- Histoire de la France au XIXe siècle.
- Histoire de la langue française.
- Le style littéraire.
Suggestion de livres
[➕ Autres choix…]