Grand Siècle

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Présentation

Portrait de Louis XIV en costume de sacre (par Hyacinthe Rigaud, 1701).

Le Grand Siècle est le nom donné au siècle de Louis XIV, dont le règne (1643-1715) a été l’un des plus longs de l’histoire de France. En effet, la seconde moitié du XVIIe siècle français est dominée par la personne de Louis XIV et est caractérisée par des œuvres grandioses. Il faut noter que l’historiographie contemporaine l’applique aujourd’hui à une période plus longue qui englobe la majorité du XVIIe siècle et le début du XVIIIe siècle. Elle pourrait courir du début du règne de Louis XIII (1610) – qui voit le rétablissement de l’autorité royale et la fin des guerres de religion – jusqu’à la mort de Louis XIV en 1715 ou la fin de la Régence en 1723.

💡 Le terme grand siècle peut s’employer en tant qu’adjectif. Il sert à qualifier ce qui a certaines caractéristiques (grandeur, distinction, etc.) propres à cette époque. Exemple : Il n’y a rien comme ces vieilles masures, lorsqu’on les arrange… Ça vous prend un chic ! N’est-ce pas ? tout à fait grand siècle. (Émile Zola, Nana, 1880).

→ À lire : Louis XIV, le Roi-Soleil. – Histoire de la France : l’Ancien Régime. – La littérature français du XVIIe siècle : l’âge baroquel’âge classique.
→ Exercice : Le théâtre au siècle de Louis XIV.

Le Grand Siècle ludovicien

Contemporaine du règne de Louis XIV, l’expression « Grand Siècle » date de 1687 : le 27 janvier en effet, Charles Perrault fait lecture devant les membres de l’Académie d’un poème à la gloire du roi, le Siècle de Louis le Grand. Il y expose une idée essentielle, contenue dans ces deux vers : « Que l’on peut comparer, sans crainte d’être injuste, le siècle de Louis, au beau siècle d’Auguste ». En associant dans sa réflexion anciens et contemporains, Perrault relance certes la querelle des Anciens et des Modernes mais, surtout, il proclame le siècle de Louis XIV digne de celui de l’empereur romain, voire supérieur. Quelque soixante ans plus tard, Voltaire déclare à son tour, dans son introduction du Siècle de Louis XIV (1751), que cette période est « le siècle le plus éclairé qui fut jamais ». Selon le philosophe, ce Grand Siècle débute les dernières années du gouvernement de Richelieu et se termine quelque temps après la mort de Louis XIV. Enfin, il est à noter que pour l’historien Jules Michelet, le Grand Siècle ne correspond pas au règne de Louis XIV mais au XVIIIe siècle, associé aux Lumières (Histoire de la Révolution française, 1847).

De fait, appelé « Roi-Soleil » ou « Louis le Grand », Louis XIV a marqué de son empreinte le gouvernement monarchique de la France — apogée de l’absolutisme, autorité suprême indiscutée — mais également le reste de l’Europe — politique belliqueuse et expansionniste. Lorsque Louis XIV prend le pouvoir personnel en 1661, la France sort d’une guerre civile héritée de la régence. Néanmoins, le peuple voit en ce roi jeune et chevaleresque un garant de succès et d’unité, et un symbole de la supériorité française. Durant le règne du Roi-Soleil, la cour de France est reconnue comme la plus brillante d’Europe. L’art et la littérature, déjà parvenus à une haute expression (avec le peintre Nicolas Poussin et les philosophes René Descartes et Blaise Pascal), connaissent un développement exceptionnel.

Pour ces multiples raisons, le règne de Louis XIV est aujourd’hui encore qualifié de « Grand Siècle ».

Le Grand Siècle de l’absolutisme
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De la mort de Louis XIII (1643) au gouvernement direct de Louis XIV (1661), la gestion de la France est détenue par la reine-mère, Anne d’Autriche, et par son principal conseiller, le cardinal Mazarin. Durant les premiers temps de la régence, ils ont dû faire face à une série de révoltes remettant en cause l’autorité royale (la Fronde), et ont conclu la guerre de Trente Ans. En outre, ils ont négocié le mariage de Louis avec sa cousine, l’infante Marie-Thérèse d’Espagne, lors du traité des Pyrénées (1659), qui permet en outre le rattachement à la Couronne de l’Artois et du Roussillon et fait du royaume de France la première puissance européenne.

À la mort de Mazarin, en 1661, le premier acte politique de Louis XIV, alors âgé de vingt-deux ans, est l’arrestation du prestigieux surintendant des Finances, Nicolas Fouquet, qui semble porter ombrage au roi. Supprimant la fonction de ministre principal et présidant en personne les Conseils royaux, le souverain affirme ainsi son autorité et établit son style de gouvernement. Ses ministres, désormais recrutés au sein de la haute bourgeoisie, sont cantonnés au rôle de conseillers ou d’exécutants. Marqué par le souvenir de la Fronde, Louis XIV recherche l’ordre en son royaume et souhaite diriger autant que régner. S’érigeant en roi de droit divin et concentrant tous les pouvoirs entre ses mains, il instaure un absolutisme triomphant, jusqu’alors inégalé.

Les premières années du gouvernement personnel sont consacrées à la mise en œuvre de la politique de Jean-Baptiste Colbert : réorganisation commerciale, financière, industrielle et navale de la France. Aux côtés de la fonction judiciaire (base du pouvoir royal traditionnel), les fonctions administratives et fiscales prennent une importance accrue. Avec l’aide de Colbert, d’Hugues de Lionne et de Michel Le Tellier, Louis XIV établit la ferme autorité de la Couronne sur le royaume de France. Dès 1665, il ordonne au Parlement d’enregistrer les édits royaux sans débats. Une police efficace est créée et la capitale, à l’aspect encore médiéval, devient progressivement une élégante cité. En province, l’exécution des décisions royales est confiée aux intendants et aux officiers.

En une période de stagnation économique, la politique mercantiliste de Colbert (exporter des produits pour engranger des métaux précieux) a un succès mitigé. Toutefois, le contrôleur général des Finances double les revenus royaux en dix ans, notamment en fondant une Ferme générale pour toutes les contributions, en augmentant le rendement de la taille et en réorganisant l’administration. La création de manufactures d’État (tels les Gobelins), les taxes aux importations de produits finis et le développement de grandes compagnies (Compagnie des Indes orientales, des Indes occidentales) illustrent sa politique dirigiste et centralisatrice.

Le Grand Siècle de l’Europe

Cet afflux de capitaux permet à Louis XIV de mener une politique étrangère ambitieuse. Les premières guerres, celles de Dévolution (1667-1668) et de Hollande (1672-1678), lui permettent d’annexer de nombreuses places fortes ainsi que la Franche-Comté. En 1679, au terme de la signature des traités de Nimègue, Louis XIV apparaît comme le maître incontesté de l’Europe et reçoit de Paris le titre de Louis le Grand : c’est alors l’apogée de son règne.

Au cours de la décennie suivante, Louis XIV perpétue sa politique belliqueuse. Roi gallican, il entre alors en conflit avec le pape Innocent IX sur la question du droit de régale (1673-1693). Le milieu des années 1680 marque un tournant dans le règne du Roi-Soleil et le début d’un épuisement irréversible de l’énergie et de la richesse de la France.

La révocation de l’édit de Nantes, en octobre 1685, est le premier signe de ce déclin. Les huguenots se voyant privés de la tolérance religieuse accordée par feu Henri IV, c’est par dizaines de milliers, parmi les plus industrieux du pays, qu’ils s’exilent vers les États protestants. Les conséquences diplomatiques de la révocation sont tout aussi désastreuses puisque la France s’aliène les États réformés sur lesquels repose son système d’alliances. C’est dans ce contexte que Louis XIV déclenche la guerre de la ligue d’Augsbourg (1688-1697), contre la coalition européenne formée par Guillaume III d’Angleterre. Elle est conclue par une paix honorable, qui met cependant fin à la politique expansionniste de la France, avec les traités de Ryswick.

Beaucoup plus catastrophique est la guerre de Succession d’Espagne (1701-1714), provoquée par l’accession au trône ibérique de Philippe V, petit-fils de Louis XIV. Après quelques premiers succès (1701-1704), la France subit une série de revers : même si le nord du royaume est envahi, Louis XIV ne peut consentir à la paix devant les conditions humiliantes qui lui sont imposées. Seule la volonté britannique d’équilibre des forces en Europe permet la conclusion des traités d’Utrecht (11 avril 1713) et de Bâle (6 mars 1714).

De fait, l’incessante politique guerrière de Louis XIV a provoqué la faillite de l’économie française et une augmentation drastique des impôts, aggravées par deux grandes famines (1693-1694 et 1709-1710). À la mort de Louis XIV, en 1715, le pays est largement endetté, les réformes de Colbert sont anéanties et une première opposition aristocratique à l’absolutisme voit le jour, notamment avec François Fénelon, le duc de Saint-Simon et le duc de Beauvillier.

Le Grand Siècle du classicisme
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Exercice : Le théâtre au siècle de Louis XIVSur le plan artistique et intellectuel, le règne de Louis XIV fournit l’un des rares exemples de création officielle réussie. Le château de Versailles, où la Cour s’installe en 1681, illustre parfaitement la magnificence du souverain. Un style classique brillant et original se développe dans l’architecture alors que dans le reste de l’Europe, le baroque domine encore.

Le Grand Siècle ludovicien est le siècle d’une littérature classique avec l’éloquence religieuse de Jacques Bossuet, la fable de Jean de La Fontaine, les maximes du duc de La Rochefoucauld et de Jean de La Bruyère, le style épistolaire de Madame de Sévigné, la satire de Nicolas Boileau; mais également d’un théâtre classique avec la comédie de Molière, la tragédie de Jean Racine, l’art dramatique de Pierre Corneille.

Le Grand Siècle est aussi le siècle de la musique avec Jean-Baptiste Lully et Jean-Henri d’Anglebert; de la peinture avec Charles Le Brun, Le Lorrain, Pierre Mignard et Hyacinthe Rigaud; de la sculpture avec François Girardon et Antoine Coysevox; de l’architecture avec Louis Le Vau, Claude Perrault, François Mansart, Jules Hardouin-Mansart et le dessinateur de jardins André Le Nôtre.

Enfin, des académies sont créées dans de nombreux domaines: Académie française (1634), Académie royale de peinture et de sculpture (1648), Académie royale de danse (1661), Académie royale des sciences (1666), Académie royale d’architecture (1671), Comédie-Française (1680).

Bilan du Grand Siècle

Le bilan du règne exceptionnellement long de Louis XIV est difficile à évaluer. Sur le plan territorial, les gains sont indéniables, avec une extension vers l’est atteignant parfois au maximum 200 km (en Franche-Comté et en Alsace). Les nouvelles frontières sur le Rhin et dans les Alpes sont plus faciles à défendre et sont renforcées par la « ceinture de fer » de forteresses édifiées par Vauban. Néanmoins, près de cinquante années de guerre ont fait de la France une menace et un ennemi pour le reste de l’Europe. Louis XIV a commis une erreur majeure en sous-estimant les enjeux maritimes et coloniaux au profit des questions continentales — erreur dont l’Angleterre tire parti au XVIIIe siècle.

En instituant une monarchie absolue, parfois plus soucieuse de fastes que d’efficacité politique, Louis XIV n’a plus à craindre la menace d’une noblesse, gardée à la Cour. Dès 1688, La Bruyère brosse, dans ses Caractères, un tableau significatif des mœurs de cette société courtisane dont il dénonce la superficialité. À l’opposé, à la fin du règne de Louis XIV, le peuple, composé à 90 p. 100 de paysans, vit toujours dans une grande pauvreté et subit une forte mortalité (espérance de vie de vingt-cinq ans), aggravée par de fréquentes famines. De fait, de la mort de Louis XIV à la Révolution de 1789, la France reste telle qu’il l’a laissée, une monarchie absolue couverte de dettes, encombrée de privilèges et incapable de toute initiative étrangère au souverain.

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