Interrogation et exclamation, apostrophe

La grammaire ► vous êtes ici

Mettre une idée en valeur (2/2)

Interrogation et exclamation, apostrophe

Annonce

💡 À lire également : Mettre une idée en valeur (1ère partie) : répétitions et reprises, accumulations, oppositions.

L’interrogation

Les interrogations – et aussi les exclamations – donnent à la phrase vie et mouvement. C’est l’âme même de l’auteur, c’est-à-dire ses sentiments et ses réactions propres, qui anime le style.

Dans le dialogue – scène d’une pièce de théâtre, entretien, dialogue, discussion – c’est par l’interrogation que s’expriment le caractère des interlocuteurs, leurs pensées, leurs traits propres. Un personnage se peint lui-même par ses paroles autant que par ses actes.
Exemples :

  • Que vouliez-vous qu’il fait contre trois ? – Qu’il mourut,
    Ou qu’un beau désespoir alors le secourut… (Corneille, Horace, acte III, scène 6)
    → C’est la question de Julie qui permet la réponse « cornélienne » du vieil Horace.
  • Quoi ? Rome donc triomphe ? – Apprenez, apprenez
    La valeur de ce fils qu’à tort vous condamnez… (Corneille, Horace, acte IV, scène 2)
    → La question souligne la joie patriotique et l’orgueil du vieil Horace.
  • Harpagon. – N’as-tu point honte, dis-moi, d’en venir à ces débauches-là, de te précipiter dans des dépenses effroyables et de faire une honteuse dissipation du bien que tes parents t’ont amassé avec tant de sueurs ?
    Cléante. – Ne rougissez-vous point de déshonorer votre condition par les commerces que vous faites ; de sacrifier gloire et réputation au désir insatiable d’entasser écu sur écu et de renchérir, en fait d’intérêt, sur les plus infâmes subtilités qu’aient jamais inventées les plus célèbres usuriers ? (Molière, L’Avare, acte II, scène 2)
    Les interrogations négatives de ces deux tirades sont en réalité de vigoureuses affirmations, et elles rendent cette scène « du père et du fils » douloureuse et presque tragique.

→ À lire : La phrase interrogative. – Le vocabulaire de la communication. – Le dialogue. – Les types de phrases. – Les confessions et les confidences. – Les verbes de parole.

Les valeurs de l’interrogation

● Une interrogation peut être atténuée par politesse.
Exemples : Puis-je me permettre de… ? – Vous demanderai-je… ? – Voudriez-vous me dire si… ?

● Au contraire, elle peut être renforcée par suite d’un sentiment de surprise, d’impatience, de colère.
Exemple : Mais quand donc terminerez-vous votre travail ?

● La phrase interrogative peut s’employer pour demander l’adhésion, l’assentiment, de façon insistante.
Exemples : Ne vous accompagnerez-vous pas ? – Vous accepterez bien, dites ?

● Les interrogations négatives sont en réalité d’énergiques affirmations.
Exemple : L’écolier le jour de la rentrée. Il avait tant de choses à dire et à entendre. Ne lui fallait-il pas savoir si Laboriette avait chassé pour de bon dans la forêt de Laigle ? Ne lui fallait-il pas répondre qu’il avait, lui, monté à cheval dans les montagnes d’Auvergne ? (Anatole France)

Annonce

● Les interrogations négatives ont la valeur d’affirmation renforcée.
Exemple : Une nuit à passer en forêt. Huriel paraissait toujours plus gai à mesure que nous étions plus en détresse. De quoi te plains-tu ? me disait-il ; ces rochers ne sont-ils pas disposés comme des cheminées, des dressoirs et des sièges ? Ne fais-tu pas ton troisième repas aujourd’hui ? Cette claire de lune n’éclaire-t-elle pas mieux que ta vieille lampe d’étain ? (George Sand)
→ En outre, des traits pittoresques et poétiques soulignent les agréments de cette nuit à la belle étoile.

● Une interrogation peut s’employer pour exprimer avec intensité un sentiment, une émotion ou une pensée. Elle fait partie de l’interrogation rhétorique ou oratoire. C’est une question qui n’attend point de réponse, mais qui est uniquement posée pour suggérer à l’auditeur ou au lecteur une réponse mentale évidente.
Exemple : L’écho de Waterloo. Seul, sous un arbre, dans la campagne de Gand, le poids des réflexions m’accablait. Quel était ce combat ? Était-il définitif ? Napoléon était-il là en personne ? Le monde était-il jeté au sort ? Succès ou revers de l’une ou l’autre armée, quelle serait la conséquence de l’événement pour les peuples, liberté ou esclavage ? Mais quel sang coulait ? Chaque bruit parvenu à mon oreille n’était-il pas le dernier soupir d’un Français ? Était-ce un nouveau Crécy ou un nouveau Poitiers, un nouvel Azincourt, dont allaient jouir pour les plus implacables ennemis de la France ? S’ils triomphent, notre gloire n’était-elle pas perdue ? Si Napoléon l’emportait, que devenait notre liberté ? (Chateaubriand)
→ L’auteur, qui déteste Napoléon, mais qui redoute pour la France les tragiques conséquences d’une défaite, se pose de douloureuses questions. Ces interrogations soulignent les sentiments contradictoires de Chateaubriand, et aussi la gravité des problèmes qui se posent.

La phrase exclamative

La phrase exclamative souligne un sentiment vif, une émotion.
Exemples :

  • Que vous êtes joli ! Que vous me semblez beau ! (La Fontaine)
    → Admiration, ici simulée et hypocrite.
  • Manger l’herbe d’autrui ! Quel crime abominable ! (La Fontaine)
    → Un sentiment soudain et violent.
  • L’empire… Si je l’avais ! (Victor Hugo)
    → Désir et regret.
  • Mourir sans tirer ma raison !
    Rechercher un trépas si mortel à ma gloire ! (Corneille)
    → Infinitif exclamatif, ayant le sens : non, je ne consentirai point à mourir sans me venger.
  • Misérable !
    → La phrase exclamative ne comprend ici que le mot essentiel.
  • Lui, ici ! Pourquoi ?
    → La phrase exclamative ne comprend ici que le mot essentiel.
  • Oh ! Ces vastes greniers de campagne, si pleins de vieilles choses, ces greniers haut perchés aux fenêtres sans croisées, où nichent les hirondelles, où l’air joue librement à travers l’antique charpente ! (Pierre Loti)
    → Proposition principale sans verbe, qui évoque avec émotion et tendresse, et en en traits précis, des souvenirs d’enfance.
  • Goût du risque et du danger. Mes amis, vive le Danger ! Si les plus forts ont un frisson à son approche, quelle merveilleuse chaleur il vous laisse au cœur en s’en allant ! Après cet appel à toutes nos forces vives, quelle expansion, quelle détente de tout l’être ! Comme on vit bien, comme on est heureux de vivre ! (Alphonse Daudet)
    → Un court paragraphe où toutes les exclamations soulignent la joie de l’action, du risque et du péril, et exaltent la vie héroïque.
L’apostrophe

L’apostrophe (n.f.) est un procédé oratoire consistant à interpeller vivement et par surprise une personne (présente ou absente) ou une chose personnifiée. Elle n’est qu’une des formes de détails de la figure plus générale de l’allocution.

Les mots en apostrophe désignent des êtres ou des choses personnifiées que l’on interpelle ou que l’on évoque.

Les écrivains, surtout les poètes, se plaisent non seulement à personnifier les objets inanimés et même les idées, mais aussi à les présenter, à leur prêter la parole, le mouvement, l’âme.
Exemples :

  • Salut, bois couronnés d’un reste de verdure,
    Feuillages jaunissants sur les gazons épars ! (Alphonse de Lamartine)
  • Waterloo, Waterloo ! morne plaine !…
    … Tu désertais, Victoire, et le sort était las !
    Ô Waterloo ! Je pleure et je m’arrête ! Hélas ! (Victor Hugo)
    → Par l’apostrophe, Victor Hugo sait animer le champ de bataille de Waterloo, et les idées elles-mêmes, la Victoire, la Déroute, « cette géante à la face effarée… ».

→ À lire : Les figures de style. – Rhétorique et style.

Annonce

En résumé

Les interrogations et aussi les exclamations donnent à la phrase vie et mouvement. Il arrive que l’interrogation soit employée par effet de style : elle marque une demande insistante ou une affirmation énergique, ou bien elle souligne un trait pittoresque, un sentiment, une émotion.

La phrase exclamative traduit un sentiment vif, une émotion.

● Par l’apostrophe, les poètes évoquent les objets inanimés. Ils les personnifient, les invoquent, les supplient, les maudissent…

Articles connexes

Suggestion de livres

Le Grevisse de l'enseignant - 1000 exercices de grammaireLe Grevisse de l’enseignant – 1000 exercices de grammaireLe Bon usageLe Bon usage
Bescherelle - Le coffret de la langue françaiseBescherelle – Le coffret de la langue françaiseÉcrire sans fautes - Orthographe - Grammaire - ConjugaisonÉcrire sans fautes – Orthographe – Grammaire – Conjugaison

[➕ Autres choix…]

Annonce

À lire également...

EspaceFrancais.com

You cannot copy content of this page