La confirmation

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Rhétorique et style

La confirmation

La confirmation est toujours la partie principale du discours : il faut y rassembler tous les arguments qui peuvent agir sur l’auditoire.

(Nouveau Larousse illustré)

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Qu’est-ce que la confirmation ?

La confirmation est le nom qu’on donne, dans la rhétorique, à la partie du discours où l’orateur prouve la vérité qu’il a annoncée dans la proposition, et dont il a fait comme le partage dans la division. C’est la partie essentielle du discours et est incluse dans la Disposition. Elle en est le fond et la substance. Arguments, lois, titres, témoignes, tout s’y trouve réuni pour convaincre… Toute l’adresse et la force de l’art oratoire y sont renfermées. Les autres parties lui sont subordonnées, et n’ont de prix qu’autant qu’elles contribuent à la faire valoir.

Concernant les preuves (ou les arguments), on a donné des règles partagées en quatre divisions : choix des preuves, ordre des preuves, manière de traiter les preuves, transition des preuves. Mais ces règles n’ont qu’une importance relative, et les traités finissent eux-mêmes par conclure qu’il appartient fréquemment au jugement de l’orateur et à l’intérêt de sa cause de s’affranchir des règles.

On dit que la confirmation est directe lorsque les preuves apportées ont directement pour but la démonstration de ce qu’il a avancé. La confirmation est indirecte quand les preuves ont pour but de détruire celles de son adversaire. La confirmation indirecte porte le nom spécial de réfutation.

→ À lire : La rhétorique. – La réfutation.

Choix des preuves

Il est d’autant plus nécessaire de choisir les preuves, que souvent le sujet en fournit beaucoup, et que trop multipliées, elles deviendraient fatigantes. L’orateur judicieux et éclairé rejette les plus légères et les moins concluantes. Celui qui ne veut rien perdre, fait croire qu’il est indigent, et lorsqu’il emploie des raisons petites et faibles, il donne lieu de penser qu’il n’en a point de fortes et de frappantes.

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Pour moi, dit Cicéron, quand je choisis mes preuves, je m’occupe moins de les compter que de les peser.

Une seule preuve solide vaut mieux qu’un grand nombre d’autres qui ne seraient que médiocres.

Il peut arriver cependant que les petites preuves soient de quelque utilité, surtout lorsqu’elles sont nombreuses.

Reconnaître les bonnes preuves

1️⃣ Les preuves seront propres au sujet. Toutes les raisons ne sont pas bonnes pour prouver toutes les vérités, et chacune de celles-ci a ses preuves qui lui appartiennent. Ainsi, dans la nature, tous les êtres ont chacun des attributs ou des qualités particulières qui les distinguent et empêchent qu’on ne les confonde. Ce caractère de propriété donne aux preuves toute leur véritable force. Sans lui, elles sont vagues, indéterminées et ne signifient rien. Il est peu d’orateurs à qui on ne puisse reprocher d’avoir quelquefois employé des preuves peu concluantes. Pour échapper à ce défaut, il faut exercer le jugement par la réflexion et par la lecture des bons auteurs. Et au moment de la composition ou de la rédaction, il ne faut jamais admettre aucune preuve dont on ne voit clairement le rapport avec le sujet.

2️⃣ Les preuves conviendront à ceux à qui on parle, c’est-à-dire, qu’elles seront comme assorties à leur intelligence et à leur disposition. En premier lieu, à leur intelligence : rien n’est plus évident ; rien ne demande plus d’attention. C’est un reproche qu’on aurait lieu de faire presque tous les jours à beaucoup d’orateurs, que l’envie de se faire admirer par une fausse profondeur, ou de briller par une érudition déplacée, rend inintelligibles à la plupart de ceux qui les entendent. C’est un mauvais goût qu’il faut proscrire. À quoi bon toutes ces belles et grandes preuves, si on ne peut les comprendre ? — En second lieu, les bonnes preuves doivent être assorties à la disposition des auditeurs. On ne doit pas toujours juger du prix d’une raison par elle-même et par sa propre nature, mais par la disposition de ceux à qui on la présente. Telle raison, qui parait faible en soi, devient triomphante pour tel auditeur, qu’elle prend par son endroit sensible.

La lecture des orateurs-qui ont excellé, et particulièrement de Démosthène, dit Gaichiez, apprend que l’éloquence consiste plus à pousser brusquement ce qui intéresse, ce qui touche de près et qui va au fait, qu’à dire de grandes choses avec nombre et avec harmonie.

3️⃣ Les preuves ne seront ni trop recherchées, ni trop communes ; mais elles tiendront un juste milieu, et présenteront à l’auditeur une nouveauté piquante et capable de réveiller son attention. Si elles étaient trop recherchées, elles se ressentiraient d’une affectation pénible, que les gens sensés ont toujours en aversion, et qui tourne infailliblement an désavantage du discours. Si elles étaient triviales, elles exciteraient le dégoût et répandraient l’ennui. L’idée qu’on se forme d’un bon orateur, fait qu’on attend de lui, sur les sujets les plus rebattus, des choses frappantes sans être extraordinaires, intéressantes sans cesser d’être simples. C’est précisément un des grands talents de ceux qui parlent en public, d’offrir toujours à l’avide curiosité de leurs auditeurs des pensées qui puissent la contenter, sans lui causer la fatigue la plus légère. On doit observer cependant qu’on n’exige des preuves nouvelles que quand le sujet paraît les comporter. S’il ne renferme absolument que des idées communes, on supplée à ce défaut par la manière dont on les présente.

Ordre des preuves

Quant à l’ordre des preuves qui ont déterminé le choix de l’orateur, ce qui est le point essentiel de la disposition, voici ce qu’ont enseigné les orateurs.

On demande, dit Quintilien, s’il faut placer les meilleures preuves au commencement, pour s’emparer tout d’un coup de l’esprit des auditeurs ; ou à la fin, dans la vue qu’ils en aient une idée plus nette et plus récente ; ou bien partie au commencement, partie à la fin, selon l’ordre de bataille que nous voyons dans Homère : ou bien s’il n’est point mieux de commencer par les plus faibles afin qu’elles aillent toujours en augmentant. Pour moi, je crois que la disposition qu’il en faut faire dépend de la nature et du besoin de la cause ; pourvu néanmoins que le discours ne décline jamais, et que de fort et solide qu’il était au commencement, il ne devienne pas frivole et misérable à la fin.

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Cicéron paraît se déterminer pour l’ordre comparé par Quintilien à l’ordre de bataille observé dans Homère.

Je ne puis m’empêcher de blâmer, dit Cicéron, la méthode de ceux qui placent en tête ce qu’ils ont de moins fort…. Ce qu’on dit d’abord doit avoir de la vigueur et de l’énergie, et être capable de faire une vive impression. Toutefois les moyens les plus puissants et les plus décisifs seront réservés pour la fin. Ceux qui seront d’une vertu médiocre, sans être cependant vicieux, pourront se placer au milieu et passer dans la foule.

En effet, on peut dire qu’il n’y a point de règle qu’on doive universellement adopter pour l’ordre des preuves, et qu’il dépend des matières que l’on traite. Néanmoins, il est à souhaiter que le discours aille toujours en croissant de sorte qu’il commence par quelque chose d’assez fort, et que de là jusqu’à la fin il y ait une progression constante. Un discours arrangé de cette manière serait très pressant et triompherait bientôt de toutes les résistances.

Manière de traiter les preuves

C’est dans la manière de traiter les preuves, et de les développer heureusement, que brille surtout le talent de l’orateur. Parmi celles qu’il a choisies, les unes sont fortes et convaincantes, les autres faibles et légères. Il doit insister sur les premières et les montrer séparément, de peur qu’elles ne soient obscurcies et confondues dans la foule. On insiste sur une preuve, en la développant quelquefois de plusieurs manières, pour en faire sentir tout le poids et en tirer tout l’avantage possible. C’est ce qu’on appelle amplification. Ce moyen de donner de la dignité ou de la force au discours, l’un des plus puissants qu’on connaisse, consiste à montrer la grandeur de ce qu’on regarde comme petit, ou la petitesse de ce qu’on regarde comme considérable.

Les rhéteurs les plus célèbres pensent que l’amplification est l’âme de l’oraison. « C’est, d’après Cicéron, une affirmation grave et énergique, qui arrive à la persuasion, en remuant les passions. » Toute la force de l’orateur, dit Quintilien, consiste dans l’art d’augmenter ou de diminuer.

Entre les moyens qui contribuent le plus au sublime, dit Longin, il faut placer ce que les rhéteurs appellent amplification.

La meilleure amplification n’est pas celle où il y a le plus de paroles, mais celle où il y a le plus de choses. Amplifier n’est donc pas accumuler des mots sur des mots, ni des phrases sur des phrases. C’est insister sur ses pensées, en leur donnant des développements pleins de raison, et qui ajoutent toujours de nouvelles choses à ce qu’on a déjà dit. À mesure qu’on amplifie, le discours doit croître en beauté, c’est-à-dire, devenir plus clair, plus animé, plus fort, plus énergique. Tout ce qui est inutile ou superflu, doit être rejeté avec le plus grand soin.

Il faut donc les idées et retrancher sévèrement le superflu. L’abondance fait naître l’obscurité. Les amplifications diffuses décèlent un esprit pauvre. Elles sont ordinaires à beaucoup de jeunes gens qui n’ont pas l’imagination exercée et dont les connaissances sont encore peu étendues.

L’amplification sagement ménagée, dit Gaichiez, opère sur une proposition, comme la sève sur un germe : elle le développe, elle le grossit et rend sensibles des parties imperceptibles. À l’aide de l’amplification, l’orateur étend sa matière, il l’orne, il la relève par des tours et des expressions qui en montrent les diverses faces : d’un corps décharné, il fait un corps nourri, et qui a de l’embonpoint.

Les sources où l’orateur aura puisé ses preuves, lui fourniront aussi les moyens de les amplifier. Il méditera, il approfondira son sujet, les détails qui lui sont propres, les circonstances qui lui appartiennent. Il les relèvera ou les fortifiera tantôt par des rapprochements, tantôt par des contrastes, par des comparaisons, et tantôt par des inductions, des exagérations, ou par une accumulation d’idées, de figures, de termes expressifs, etc.

Transitions des preuves

Il ne suffit pas de rendre les preuves concluantes par des raisonnements justes. Il faut de plus les enchaîner les unes aux autres. C’est à quoi sont destinées les transitions ou les liaisons. On entend par ce mot les expressions, les tours ou les pensées dont l’orateur se sert pour passer d’un objet à un autre. Elles sont d’une grande importance dans le discours oratoire. Sans elles, il est décousu et composé de pièces et de morceaux, qui se rapprochent et ne s’unissent pas, qui se succèdent et ne se suivent pas, qui ne font jamais un tout.

Les transitions sont l’écueil des écrivains qui n’ont pas assez étudié et mûri leur sujet, ou qui manquent de la justesse pour saisir les rapports qui unissent entre elles des choses différentes. De là, tant de liaisons forcées, peu naturelles, singulières, ridicules, qui déparent le discours au lieu de l’orner, et qui font regretter souvent que l’orateur en ait fait usage. Car il vaut mieux encore se passer de transitions, que d’en employer de mauvaises. Les meilleurs transitions sont celles qui ont une liaison sensible avec ce qui a été dit et avec ce que l’on va dire.

Les transitions admettent tous les ornements de style, pourvu qu’ils soient bien naturels et sans aucune affectation. On en relève la monotonie par des interrogations, des apostrophes, etc., par des images et des sentiments. Quelquefois un habile orateur sait se passer de transitions, ce qui arrive quand les preuves semblent naître les unes des autres, et se suivre naturellement d’elles-mêmes.

→ À lire : Les connecteurs logiques. – L’image (en littérature). – Analyser un texte argumentatif. – Le raisonnement par syllogisme. – Le dilemme.

Défauts à éviter

Il y a deux grands défauts à éviter, quand on traite la preuve. Le premier est de prouver les choses claires que personne ne conteste, et qu’il suffit d’énoncer. Le second est de s’arrêter trop longtemps sur une preuve et de l’épuiser. L’amplification doit avoir des bornes : poussée trop loin, elle devient fatigante, elle expose à des redites et donne une mauvaise idée des raisons de l’orateur, par la précaution même qu’il prend de vouloir les porter à la dernière évidence. Ne dire que ce qu’il faut est un grand art. C’est le fruit de l’expérience et le secret des habiles maîtres.

Les preuves servent tout à la fois à convaincre et à toucher. Il faut donc, pour bien les traiter, savoir exciter les passions et raisonner avec justesse.

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