Le Roman de Troie
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Le Roman de Troie
– de Benoît Sainte-Maure –
Présentation de l’œuvre
Le Roman de Troie (ou de Troyes) est une composition romanesque française du XIIe siècle. C’est la plus importante des transformations de l’épopée antique au Moyen Âge. Elle contient plus de 30,000 vers, uniformément de huit syllabes, avec rimes masculines et féminines, d’ordinaire entremêlées. L’auteur de ce vaste poème, dont on a conservé plus de vingt-cinq manuscrits dans les bibliothèques, se nomme Benoît de Sainte-More, qui paraît être le même que le trouvère normand Benoît, auteur de la Chronique des ducs de Normandie, immense récit également en vers octosyllabiques. Quoi qu’il en soit de cette identité, qui est contestée, on attribue au même trouvère les deux autres grands poèmes empruntés à l’épopée latine, l’Enéas et le Roman de Thèbes.
Le Roman de Troie est une imitation ou tout au moins un souvenir plus on moins fidèle de l’Iliade. L’auteur emprunte au récit d’Homère, qu’il a peut-être imparfaitement connu, le plan et la marche de l’action, avec les rôles et les relations des personnages ; mais il approprie le poème antique aux mœurs, aux idées de son temps et mêle les souvenirs de la guerre de Troie à toutes les légendes de la littérature romanesque. Il s’inspire, dans le développement d’un sujet grec, à la fois de la chanson de geste et de la Table Ronde. Il trouve moyen d’enrichir et d’agrandir encore la matière. Il la reprend de plus haut et la mène plus loin, commençant le récit par la conquête de la Toison d’or, et le conduisant jusqu’à la mort d’Ulysse. Le merveilleux mythologique s’efface, dans le Roman de Troie, devant le merveilleux des aventures car, à cette époque, les héros anciens se transforment entièrement sous l’influence des idées chrétiennes. Les noms restent grecs et romains, les événements sont au fond les mêmes, mais les caractères changent du tout au tout. Les exploits sont inspirés par des passions et des sentiments inconnus à l’antiquité, et il ne reste de l’œuvre homérique que le cadre, les péripéties et le dénouement.
Cette métamorphose de l’épopée grecque a eu un grand succès, et le Roman de Troie, en particulier, a conservé longtemps sa réputation. Traduit en prose an XIVe siècle, il est mis sur le théâtre dans le siècle suivant. Jacques Millet l’a imprimé sous ce titre : Destruction de Troyes la Grant, mise en rime française et par personnages (Paris, 1484), et il a été souvent réimprimé depuis. L’ancien roman français fut traduit en grec an XVe siècle, et il existe à la Bibliothèque nationale un manuscrit de cette version, qui est littérale.
Quatrième de couverture
Lorsqu’il entreprend, vers 1160-1170, de conter l’histoire de Troie, Benoît de Sainte-Maure s’inscrit dans une mode et dans un courant littéraire : dans l’entourage d’Henri II Plantagenêt et d’Aliénor d’Aquitaine, d’autres écrivains, avant lui ou autour de lui, ont adapté en français, « mis en roman », à l’intention d’un nouveau public, des œuvres majeures de l’Antiquité latine. Les sources qu’utilise Benoît sont plus modestes ; du moins sont-elles perçues par l’écrivain et par ses lecteurs comme relations véridiques de la guerre de Troie. Benoît respecte avec zèle la trame solide qu’elles déploient. Mais leur relative indigence lui permet aussi de faire très librement « germer, fleurir et fructifier » la matière héritée, en entrelaçant habilement aux exploits guerriers des héros grecs et troyens le récit de leurs amours impossibles : amours condamnées de Jason et de Médée, de Pâris et d’Hélène, de Troïlus et de Briséida, d’Achille et de Polixène.
Troie doit être détruite ; ainsi l’exige la vérité historique. Mais l’art abouti de Benoît reconstruit, pour le Moyen Âge, voire au-delà, l’image fascinante d’une civilisation parvenue à son apogée, d’une cité splendide, origine et source de tous les peuples de l’Occident chrétien.
Source : Quatrième de couverture de l’édition du Livre de Poche.
⬆ Adoubement d’un chevalier. Enluminure extraite du Roman de Troie (1160) de Benoît de Sainte-Maure (Bibliothèque nationale de France, Paris).
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