Les mythes de la fertilité et de la fécondité

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Les mythes de la fertilité et de la fécondité

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Présentation

🥚 Les mythes de la fertilité et de la fécondité impliquent les croyances relatives à la fertilité de la terre ainsi qu’à la fécondité des êtres humains et des animaux.

Gages de prospérité pour l’ensemble des sociétés humaines, la fertilité et la fécondité occupent une place majeure dans les préoccupations de ces dernières, se traduisant par l’importance capitale qui leur est accordée dans la plupart des mythologies et religions — selon l’historien Georges Dumézil, elles sont au nombre des trois fonctions principales (spirituelle, guerrière et productrice) gouvernant toutes les religions indo-européennes.

→ À lire également : Les mythes de la création. – Les mythes des enfers. – Les mythes de la fin du monde. – Les mythes du déluge. – Les mythes de la nuit. – Les mythes de la Lune. – Les mythes du Soleil. – Les mythes de la mer. – Les mythes des eaux douces. – Les mythes de la fertilité et de la fécondité.

 

La Terre-Mère

L’image d’une déesse primitive incarnant la fécondité semble présente dans de nombreuses cultures depuis des temps très anciens, comme en témoignent les Vénus stéatopyges du paléolithique, statuettes féminines pourvues de formes particulièrement généreuses. Taillées dans l’ivoire, l’os ou la pierre, ces figures (telles la Vénus de Willendorf [vers 26000-23000 av. J.-C.] et la Vénus de Lespugue [vers 23000 av. J.-C.]), sont les premiers exemples connus d’une tradition qui, s’illustrant sur de nombreux territoires, se poursuit durant la période néolithique. Apparaît ainsi de façon progressive, au sein de quasiment toutes les cultures, la figure d’une déesse suprême de la fertilité couramment associée à la terre nourricière et qui, à ce titre, est fréquemment connue sous le nom de Terre-Mère. Une autre appellation commune à ce type de divinités est celui de Grande Déesse ; celle-ci, qui prend la forme de Mahadevi (« Grande Déesse ») en Inde, se matérialise de manière plus concrète durant l’Antiquité au travers de la figure d’Ishtar, vénérée par les Assyriens et les Babyloniens, d’Ashtart (ou Astarté), honorée par les Phéniciens, ou encore de Gaia, la Terre, à laquelle les Grecs anciens attribuent le pouvoir de rendre la terre fertile et de protéger la fécondité humaine. Chez les Romains, ces fonctions sont attribuées à Tellus, également connue sous le nom de Terra Mater (littéralement « Terre Mère »). La déesse Cybèle, dont le culte provient d’Asie Mineure et se développe par la suite en Grèce et à Rome, et qui peut être considérée comme la plus importante des déesses du Proche-Orient durant l’Antiquité, surpasse quant à elle les autres divinités de ce type par son pouvoir qui s’applique non seulement aux hommes, aux animaux et au règne végétal, mais également aux dieux.

Sous l’influence de la pensée chrétienne, les déesses-mères ancestrales donnent progressivement naissance, en Occident, au culte des Vierges noires, symboles de fécondité directement liés à la figure de Marie et auxquelles sont attribués des pouvoirs miraculeux. De nombreux pèlerinages s’organisent ainsi dès le Moyen Âge vers les villes qui possèdent des représentations de Vierges noires, telles que, en France, Rocamadour ou Le Puy-en-Velay, afin de solliciter leurs faveurs.

Certains animaux sont également associés aux questions de fécondité. Dans cette perspective, signalons l’exemple du lièvre, comme le montrent notamment les légendes chinoises, celui du chat, adoré dans l’Egypte antique, et celui du dragon, qui occupe une place de choix dans les croyances des pays d’Asie. En Chine, ce dernier est ainsi associé à la pluie et au renouveau de la nature après la période hivernale, tandis qu’en Indonésie, il est relié à différentes divinités de la fertilité ainsi qu’à l’élément aquatique.

Ashtart, déesse de l'Amour, de la Fécondité et de la Productivité

AshtartAshtart (ou Astarté) est le nom donné par les Grecs et les Romains à Ashtoreth, divinité suprême des Phéniciens. Déesse de l’Amour, de la Fécondité et de la Productivité, elle symbolisait, à l’époque du roi d’Israël Salomon (X e siècle av. J.-C.), la femme sous toutes ses facettes. Elle fut assimilée à plusieurs déesses grecques dont Artémis et Aphrodite.

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Une multitude de divinités

Outre les figures des Grandes Déesses, l’importance du thème de la fécondité et de la fertilité se traduit par l’existence, dès l’époque antique et dans toutes les cultures, de diverses autres divinités ayant une influence dans ce domaine. Ces dieux ou déesses ont généralement des attributions relatives aux cycles de la nature, et sont fréquemment plusieurs, au sein d’un même système mythologique, à se partager les différents aspects de la fécondité et de la fertilité. Ainsi, dans la mythologie scandinave, les attributions de fertilité sont confiées au dieu de la Mer Njörd et à ses enfants, Freyr (qui assure le renouveau de la végétation au printemps) et Freyja (déesse de l’Amour). Certains dieux sont, cependant, aux origines, exclusivement consacrés à la fécondité, à l’image du dieu égyptien ithyphallique Min, divinité symbolisant la vigueur sexuelle masculine et les forces contrôlant la procréation (et qui, par extension, présidera au cycle des récoltes), plus tardivement associée à Amon sous la forme d’Amon-Min.

Les divinités de la nature et de la végétation

Dans l’Égypte ancienne, « don du Nil » selon les termes de l’historien grec Hérodote, la fertilité des terres et, par conséquent, la prospérité du pays, sont liées aux crues du Nil, fleuve sacré. Aussi, dans le panthéon de l’Égypte ancienne, des dieux associés au fleuve sacré sont-ils reliés à la fertilité et à la fécondité, tel Khnoum, dieu créateur façonnant les hommes sur son tour de potier, qui est le gardien des sources du Nil et déclenche ses crues. Hâpi, divinité hermaphrodite dotée de formes opulentes — seins lourds et ventre proéminent — et généralement coiffée de plantes aquatiques (le papyrus, le lotus ou le lys), personnifie quant à lui le fleuve sacré lui-même ; parfois représenté portant deux vases d’où coule le Nil ou un plateau couvert de la nourriture que ce dernier procure, il commande lui aussi aux crues. D’autres divinités égyptiennes sont elles aussi associées aux notions de fécondité et de fertilité, à l’image d’Osiris qui, avant d’être adoré comme dieu des Morts, personnifiait le renouveau de la végétation au printemps, ou de Bastet, qui incarne le pouvoir positif du Soleil sur la fertilité.

La mythologie grecque accorde pour ces questions une place de premier ordre à Pan, dieux des Troupeaux et des Bergers, et à Dionysos, dieu de la Vigne, du Vin et de l’Ivresse. Priape — dont l’emblème, un phallus, est couramment planté dans les champs — joue pour sa part un rôle majeur dans la reproduction des troupeaux et la bonne santé de la vigne. Déméter — assimilée à Cérès dans la mythologie romaine —, fait quant à elle germer et mûrir le blé. À Rome, la confrérie des douze Frères Arvales célèbre une importante fête en l’honneur de la déesse Dea Dia (« déesse divine »), se livrant à divers sacrifices et célébrations afin de produire une influence positive sur la fertilité des terres cultivées.

De façon générale, les divinités ayant une action positive sur la végétation (cultivée comme sauvage) ou la bonne santé des troupeaux se trouvent souvent dotées, par extension, d’une influence sur la fécondité humaine. Ainsi, le dieu romain Faunus, dieu des Champs et des Bergers, capable d’une action positive sur la fertilité agricole, est également associé aux fêtes des Lupercales, au cours desquelles les femmes qui souhaitent voir survenir une grossesse doivent être frappées par le fouet des prêtres.

Les divinités présidant à la procréation

En Grèce, Héra, protectrice du mariage, est aussi celle de la fécondité des époux ; Aphrodite, déesse de la Beauté et de l’Amour, influence les amours des hommes et veille à la fécondité des époux, tandis que l’Artémis d’Éphèse est une déesse nourricière qui, représentée dotée de plusieurs rangées de seins (ou de testicules de taureau selon les interprétations), offre son lait à la fois aux hommes et à la Terre.

Dans la Rome antique sont adorées Bona Dea (la « Bonne Déesse »), qui rend à Rome des oracles favorisant la fécondité des femmes, et la déesse Mater Matuta, tardivement identifiée à l’Aurore, qui protège la fécondité féminine et la maternité.

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Les divinités associées à l’astre lunaire

De nombreuses divinités associées à la Lune se voient dotées d’attributions dans le domaine de la fertilité et de la fécondité, à l’image de la déesse Mawu des Fon (au Bénin) qui incarne la Lune et représente, dans le couple qu’elle forme avec le Soleil, le principe féminin associé à la fécondité. Dans les croyances mayas, la déesse Ixchel, la Lune, est, de même, associée à la fécondité et à la fertilité.

Citons également, dans la Rome antique, Junon qui, associée à la Lune sous le nom de Junon Lucetia, a une influence positive sur la fécondité des époux sous celui de Junon Caprotina, tandis que Junon Lucina protège les femmes enceintes et veille au bon déroulement des accouchements.

Dans la mythologie grecque, Artémis, par ailleurs figure redoutable, est parfois, dans son aspect lunaire, considérée comme protégeant elle aussi les accouchements.

Divinités mineures

À côté des dieux et déesses majeurs, la plupart des cultures possèdent également de nombreuses divinités secondaires ou des créatures aux pouvoirs magiques ayant une influence positive sur la fertilité et la fécondité. Ainsi l’on connaît, dans la Rome antique, de nombreuses nymphes liées à la fertilité agricole et plus largement à la végétation à l’image de Pomone ou de Flore (qui, selon Ovide, fait don à Junon d’une fleur dont le simple contact rend toute femme féconde).

Dans des croyances très anciennes développées dans les mythologies germaniques et nordiques, les elfes possèdent une influence bénéfique à la fois sur la fécondité et la fertilité, de même que les fées, également associées à la fécondité et aux naissances. Évoquons encore, dans le nord de l’Europe, les divinités secondaires nommées Matres, Matrae ou Matronae, vénérées pour leur rôle positif dans ce domaine.

Succession des saisons et renaissance

Les grands mythes se rapportant à la fertilité sont pour la plupart en lien avec la succession des saisons. La légende de Déméter en est l’une des plus célèbres. Sa fille Perséphone étant devenue l’épouse d’Hadès, dieu des Morts, et sa prisonnière au royaume des Enfers, Déméter, sous l’emprise de la tristesse, cesse de faire produire ses récoltes à la terre. Zeus intervient pour remédier à cette situation ; il obtient d’Hadès que Perséphone revienne séjourner sur terre durant la moitié de l’année. La joie de Déméter au retour de sa fille a pour conséquence le réveil de la nature, et le séjour sur terre de cette dernière correspond au printemps et à l’été. Un mythe similaire des mythologies assyrienne et babylonienne met en scène Ishtar, en l’honneur de laquelle se déroulent des pratiques de prostitution sacrée ayant, selon les croyances, une influence positive sur la fertilité, et son amant Tammuz, dieu de la Végétation. Descendue aux Enfers, Ishtar y est retenue prisonnière par sa sœur Ereshkigal, déesse de la Mort ; en l’absence d’Ishtar, la désolation s’abat sur les terres, qui se trouvent privées de toute récolte. Le dieu Ea (Enki), le « seigneur de la terre », intervient alors pour lui faire quitter le monde souterrain. Cependant, Tammuz doit y séjourner à sa place durant une partie de l’année, son absence fournissant l’explication de l’absence de végétation durant l’automne et l’hiver.

Le mouvement circulaire du tour de potier du dieu égyptien Khnoum, qui peut être vu comme une allégorie des cycles de la végétation, peut aussi être interprété comme une image des cycles de la vie et de la mort. Ainsi, en raison des renouvellements cycliques qui la gouvernent, la fertilité est couramment associée à l’image de la résurrection. À cet égard, le mythe égyptien d’Isis et d’Osiris, dans lequel le dieu est assassiné par son frère puis ramené à la vie par son épouse, s’affirme comme le symbole puissant du renouvellement perpétuel des cycles de la nature.

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