L’ode badine

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L’ode badine

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Définition

L’ode badine ou gracieuse, dont le poète grec Anacréon est le père, est celle qui roule sur des sujets légers, agréables et tendres. Elle aime les descriptions riantes, les chants joyeux, les scènes touchantes et aimables, les pensées et les tableaux gracieux. Ainsi, les déserts s’embelliront et deviendront fertiles ; les collines seront revêtues d’allégresse ; et les vallées, enrichies de la multitude des grains, élèveront la voix et chanteront l’hymne des louanges.

→ À lire : L’ode anacréontique.

Le ton de l’ode badine

L’ode gracieuse, laissant les sujets les plus nobles et le caractère le plus élevé au genre grave et solennel, demande un ton simple et modéré, un naturel aimable et un style léger. Son caractère dominant doit être la douceur, l’élégance, la fraîcheur et la gaieté. Elle est, aussi bien que l’ode élevée, susceptible d’enthousiasme, puisque cet enthousiasme n’est qu’un sentiment produit par l’imagination qui se représente vivement un objet quel qu’il soit. Mais, dans la première, l’âme du poète est agitée avec violence dans celle-ci, elle est émue légèrement. Ce sont les jeux et les plaisirs qu’il chante c’est le sentiment qu’il peint avec les couleurs les plus douces. Ses tableaux, sans être trop riches, sont toujours frais et riants. Ses pensées, sans être trop élevées ou trop fortes, sont toujours vives, naturelles et délicates. Son style n’a rien de pompeux, mais il est toujours élégant et varié. Le poète peut, dans cette espèce d’ode, répandre avec grâce des traits de morale, et y entremêler de fines louanges.

Exemple d’une ode badine

Dans l’ode badine, le poète peut y répandre avec grâce des traits de morale et y entremêler de fines louanges. Telle est l’ode de Chaulieu sur Fontenay, son pays natal :

Les éloges de la vie champêtre, à Fontenay,
en 1707

Désert, aimable solitude,
Séjour du calme et de la paix,
Asile où n’entrèrent jamais
Le tumulte et l’inquiétude,

Quoi ! j’aurai tant de fois chanté
Aux tendres accords de ma lyre
Tout ce qu’on souffre sous l’empire
De l’amour et de la beauté ;

Et, plein de la reconnaissance
De tous les biens que tu m’as faits,
Je laisserai dans le silence
Tes agréments et tes bienfaits !

C’est toi qui me rends à moi-même ;
Tu calmes mon cœur agité ;
Et de ma seule oisiveté
Tu me fais un bonheur extrême.

Parmi ces bois et ces hameaux,
C’est là que je commence à vivre ;

Et j’empêcherai de m’y suivre
Le souvenir de tous mes maux.

Emplois, grandeurs tant désirées,
J’ai connu vos illusions ;
Je vis loin des préventions
Qui forgent vos chaînes dorées.

La cour ne peut plus m’éblouir :
Libre de son joug le plus rude,
J’ignore ici la servitude
De louer qui je dois haïr.

Fils des dieux, qui de flatteries
Repaissez votre vanité,
Apprenez que la vérité
Ne s’entend que dans nos prairies.

Grotte d’où sort ce clair ruisseau,
De mousse et de fleurs tapissée,
N’entretiens jamais ma pensée
Que du murmure de son eau.

Bannissons la flatteuse idée
Des honneurs que m’avoient promis
Mon savoir-faire et mes amis,
Tous deux maintenant en fumée.

Je trouve ici tous les plaisirs
D’une condition commune ;
Avec l’état de ma fortune
Je mets de niveau mes désirs.

Ah ! quelle riante peinture
Chaque jour se montre à mes yeux
Des trésors dont la main des dieux
Se plaît d’enrichir la nature !

Quel plaisir de voir les troupeaux .
Quand le midi brûle l’herbette,
Rangés autour de la houlette,
Chercher le frais sous ces ormeaux,

Puis sur le soir à nos musettes
Ouïr répondre les coteaux,
Et retentir tous nos hameaux
De hautbois et de chansonnettes !

Mais, hélas ! ces paisibles jours
Coulent avec trop de vitesse ;
Mon indolence et ma paresse
N’en peuvent suspendre le cours.

Déjà la vieillesse s’avance ;
Et je verrai dans peu la mort
Exécuter l’arrêt du sort,
Qui m’y livre sans espérance.

Fontenay, lieu délicieux
Où je vis d’abord la lumière,
Bientôt au bout de ma carrière,
Chez toi je joindrai mes aïeux.

Muses, qui dans ce lieu champêtre
Avec soin me fîtes nourrir,
Beaux arbres, qui m’avez vu naître,
Bientôt vous me verrez mourir !

[…]

(Guillaume Anfrye de Chaulieu, « Les louanges de la vie champêtre, à Fontenay, en 1707 », in Les Poésies de Chaulieu, La Fare, Paris, 1803)

👤 Guillaume Anfrye de Chaulieu
Guillaume Anfrie (ou Anfrye), abbé de Chaulieu, né à Fontenay-en-Vexin au Domaine de Beauregard en 1639 et mort à Paris le 27 juin 1720, est un poète libertin français. Il excelle dans le genre des « vers de société ». Fontenay et la Retraite sont parmi les mieux connues de ses poésies d’inspiration anacréontique. Il a même fait l’objet d’une comédie de Philipon de La Madelaine, Chaulieu à Fontenay, (1800). Ses travaux ont été édités avec ceux de son ami le marquis de La Fare en 1714, 1750 et 1774.

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Badin… selon le dictionnaire

1️⃣ En parlant d’une personne ou de son esprit : Qui manifeste un naturel gai et enjoué, parfois un peu folâtre ou moqueur.
− Par extension : Qui aime à folâtrer et à rire (caractère, esprit, humeur badin.e).

2️⃣ En parlant d’un style, d’un genre littéraire ou artistique : Qui raconte une histoire plaisante ou est écrit dans un style léger (épître, littérature badine ; poème badin, vers badins).
En musique : dont l’écriture ou l’exécution est faite de manière enjouée et légère.
– En parlant d’une chose appartenant ou ressemblant à une chose : Qui a un aspect un peu folâtre et frivole.

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