Pierre de Ronsard : Les Amours (1560)

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Les Amours (1560)

– Pierre de Ronsard –

👤 Pierre de Ronsard
Pierre de Ronsard (1524-1585) est poète et courtisan français, salué par les cours et les humanistes européens de la Renaissance comme le successeur d’Homère en France. Initiateur de la Brigade (future Pléiade), il domine le monde poétique de son époque par sa production aussi abondante que variée. On en retient généralement les divers sonnets amoureux et les discours philosophiques. [Lire la suite de sa biographie]
→ À lire aussi : La littérature française du XVIe siècle. – L’Humanisme (XVIe siècle). – Histoire de la France : L’Ancien Régime.

Présentation

Portrait posthume de Ronsard par l'École de Blois (vers 1620), représenté de façon anachronique avec une barbichette en pointe.

Les Amours est un recueil de poèmes de Pierre de Ronsard, publié en 1560. Ce recueil est constitué de sonnets et d’autres formes poétiques, tous centrés sur le thème de l’amour. Les poèmes sont écrits dans un style élégant et raffiné, typique de la poésie de la Renaissance française. Les poèmes de Ronsard dans Les Amours abordent des sujets tels que la beauté féminine, le désir amoureux, la joie et la tristesse de l’amour, ainsi que des thèmes plus philosophiques tels que la nature changeante de l’amour et la valeur de l’amitié. Le recueil est considéré comme l’un des meilleurs exemples de poésie lyrique française de la Renaissance et a eu une grande influence sur la littérature française ultérieure.

De 1552 (premier livre des Amours) à 1578 (Sonnets pour Hélène), Ronsard n’a jamais cessé de chanter l’amour. Dédiant ses écrits à trois femmes, Cassandre, Marie et Hélène, il parle en fait de sentiments éprouvés lors de multiples rencontres amoureuses parmi lesquelles on peut citer Marguerite, Jeanne, Madeleine, Rose, Sinope, Genèvre, Isabeau…

En 1560, Ronsard publie l’ensemble de ses œuvres à Paris chez Gabriel Buon. Il consacre le premier tome aux Amours, qu’il divise en deux livres : Les Amours de Cassandre (publié en 1552 et 1553) et Les Amours de Marie, réédition remaniée de La Continuation des Amours de 1555 et de La Nouvelle Continuation des Amours de 1556. Ce Second Livre des Amours se complète en 1578, d’une seconde partie intitulée « Sur la mort de Marie ».

La double musique du Canzoniere

L’ensemble comporte plus de 350 poèmes, pour l’essentiel des sonnets, qui voisinent cependant, dans le Second Livre, avec des chansons, des odelettes ou des madrigaux. On relève traditionnellement la structure binaire et antagoniste opposant les deux figures d’inspiration (Cassandre et Marie) et les deux styles d’écriture correspondants (haut et bas). Les Amours, qui ont été pour l’essentiel des poèmes publiés avec une partition musicale, ont assuré à Ronsard la reconnaissance qu’il escomptait auprès de Henri II et Henri III, pour lesquels le chant était une élégance recommandée.

La gloire de Cassandre

QLes Amours de Cassandre décline la thématique pétrarquiste de la célébration d’une maîtresse réticente au partage amoureux, traduisant l’état de doute, d’espoir et de désespoir successifs que le poète connaît face aux transports où le conduit la cruauté de sa belle. Les 222 poèmes reprennent le thème de l’innamoramento, dispensateur de souffrance et de plaisir, et les motifs de la dame froide et muette, alimentant les supplices de l’amant, partagé entre le désir de la femme aimée et celui de se libérer de son emprise par la plume.

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Cassandre serait Cassandre Salviati, une jeune noble rencontrée à un bal en 1545, mais il est plus légitime de penser que la célébration de Cassandre jouit d’une poétique élaborée sur son nom : Cassandre est en effet aussi une princesse de Troie, aimée sans retour par Apollon. En même temps qu’une sublimation néoplatonicienne de l’amour impossible se crée autour de Cassandre — au point de la revêtir de la Beauté archétypale dont la contemplation conduit le cœur du poète-amant vers les sphères de la Poésie inspirée —, le message philosophique se double de marques érotiques, héritées de l’Anthologie grecque.

Dire l’amour serait le faire ; l’inspiration poétique et l’inspiration amoureuse se lient et s’entrecroisent si étroitement que les rôles s’inversent : Ronsard devient un chantre guerrier.

Marie-Aimer

Appelé Les Amours de Marie, le Second Livre ne rompt pas avec le premier et s’ouvre sur une série de 70 sonnets reprenant les thèmes qui ont fait la gloire de Cassandre. Elle ne quittera jamais le recueil s’imposant même par son absence et sa grandeur lorsqu’elle est remplacée par Marie ou d’autres inspiratrices.

En plongeant le lecteur dans l’univers bucolique de l’amour partagé, relaté dans un style bas et des formes variées, Ronsard impose inévitablement la comparaison de l’univers souverain de Cassandre, avec celui imprévu et gaillard des maîtresses. Il délaisse ainsi le pétrarquisme le court temps des émois de l’inconstance galante. Mais il double ses poèmes d’une réflexion sur la précarité du partage et dialogue finalement plus avec la Muse et lui-même qu’avec sa maîtresse, dans une longue méditation sur la nature humaine et ses tempéraments, sur la prépondérance du désir, nécessaire à la vie, mais qui « en peu de temps sera tout flétri ».

Marie ne serait qu’un prétexte à dire les fins poétiques de l’amour où le sublime est d’autant plus attendu qu’il réside dans la célébration de la beauté multiple du monde. La dynamique du Second Livre des Amours est inscrite dans l’anagramme Marie-Aimer : c’est l’amour platonicien unissant les êtres dans la jouissance commune de leur contemplation, afin de les élever vers la Beauté dont il provient, que chante Ronsard. Et quand dans la dernière partie, il fait mourir Marie comme une princesse, jouant de la similitude des prénoms de Marie l’Angevine et de Marie de Clèves, il revient fidèlement à Cassandre, dont seul le rayon de l’œil « lui apprit ce qu’est aimer ».

Extrait : « Comme on voit sur la branche… »

Ce sonnet extrait du dernier recueil des Amours (dans son édition de 1578 uniquement) a peut-être été composé pour Marie Dupin (ou Marie l’Angevine), dédicataire des précédents poèmes, ou bien en l’honneur de Marie de Clèves, la maîtresse d’Henri III. Ronsard y reprend le thème allégorique de la femme-fleur qui lui permet d’évoquer sans violence la mort, et de suggérer une émotion qu’atténuent les sonorités et le rythme de ces strophes.

Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose
En sa belle jeunesse, en sa première fleur,
Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur,
Quand l’aube de ses pleurs au point du jour l’arrose :

La grâce, dans sa feuille, et l’amour se repose,
Embaumant les jardins et les arbres d’odeur ;
Mais, battue ou de pluie ou d’excessives ardeur,
Languissante elle meurt, feuille à feuille déclose.

Ainsi en ta première et jeune nouveauté,
Quand la terre et le ciel honoraient ta beauté,
La Parque t’a tuée, et cendre tu reposes.

Pour obsèques reçois mes larmes et mes pleurs,
Ce vase plein de lait, ce panier plein de fleurs,
Afin que vif et mort ton corps ne soit que roses.

(Pierre de Ronsard, « Comme on voit sur la branche… », in Les Amours de Marie (« Sur la mort de Marie »), sonnet III, 1578)

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