Stefan Zweig
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Stefan Zweig
1881 – 1942
Sommaire
Présentation
Stefan Zweig, né le 28 novembre 1881 à Vienne en Autriche-Hongrie et mort le 22 février 1942 à Petrópolis au Brésil, est est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien. Il est l’un des maîtres de l’analyse psychologique, dont l’œuvre est le reflet d’un idéal humaniste et d’un esprit de tolérance héritiers des Lumières. Son œuvre est constituée essentiellement de biographies, mais aussi de romans et de nouvelles. Dans son livre testament, Le Monde d’hier. Souvenirs d’un Européen, Zweig se fait chroniqueur de cet « âge d’or » de l’Europe et analyse ce qu’il considère comme l’échec d’une civilisation.
→ À lire : La nouvelle. – Le roman. – La biographie.
Le « Monde d’hier »
Né à Vienne, Stefan Zweig est issu de la grande bourgeoisie juive libérale, polyglotte et cosmopolite, qui a provoqué l’explosion culturelle de la Vienne « fin de siècle ». Par son père, industriel austère, il a accès à l’anglais et au français ; par sa mère, qui est une Brettauer, famille aristocratique de la banque internationale, il apprend l’italien. Séjournant un semestre à Berlin pour échapper à la surveillance de la « bonne société », il fait l’expérience libératrice de la bohème étudiante. Il soutient en 1904 son doctorat sur Hippolyte Taine, qui le montre sensible au déterminisme de « la race, du milieu, du moment ».
Un esprit curieux et ouvert
En 1901, il rencontre Theodor Herzl, fondateur du sionisme. Mais, trop cosmopolite et européen pour accepter cette option, en quête d’un « surmoi », il s’enthousiasme successivement pour Émile Verhaeren, Romain Rolland et Freud. Il mène la vie mondaine d’un homme de lettres fortuné : séjours fréquents dans les capitales européennes et pied-à-terre à Vienne, puis près de Salzbourg ; intense travail de traduction ; diffusion et mise en relation des écrivains européens. Son Journal le montre rêvant paradoxalement d’isolement, séducteur, immature et vulnérable. Une biographie enthousiaste de Verhaeren (Émile Verhaeren, 1910) et un recueil de quatre nouvelles, Premiers souvenirs (Erstes Erlebnis, 1911), inaugurent les deux genres littéraires où Zweig devient maître, et « auteur à succès » immédiatement traduit. Brûlant secret (Brennendes Geheimnis, 1911), ou les émois homosexuels d’un jeune garçon, et La Peur (Angst, 1913), entremêlant amours adultères, angoisse à la frontière de la folie, exposent les thèmes de la psychanalyse.
Un maître de la forme brève
Avec Romain Rolland, il est militant pacifiste pendant la Grande Guerre. Désormais marié à Friderike von Winternitz, Zweig, collectionneur passionné de manuscrits d’écrivains, traque le mystère du génie : comment être Goethe ou Balzac ? Procédant, à partir de 1920, par trilogie de biographies et cycles de nouvelles, il rapproche Balzac, Dickens, Dostoïevski (Trois maîtres, [Drei Meister], 1920), Kleist, Hölderlin, Nietzsche (Le Combat avec le démon, [Der Kampf mit dem Dämon], 1925), Casanova, Stendhal, Tolstoï (Trois poètes de leur vie [Drei Dichter ihres Lebens], 1925), La Guérison par l’esprit (Die Heilung durch den Geist, 1931) rassemblant curieusement Anton Mesmer, Marie Baker Eddy et Freud ; il regroupe après-coup ses nouvelles « à la Balzac » : ainsi, Amok (Der Amoklaüfer, 1922), Lettre d’une inconnue (Brief einer Unbekannten), Vingt-quatre heures de la vie d’une femme (Zwanzig Stunden im Leben einer Frau, 1927), La Confusion des sentiments (Verwirrung der Gefühle, 1927) deviennent les éléments de La Chaîne (Die Kette, 1931), qui systématise vingt ans de nouvelles. Ces courts romans construits en récit dans le récit suggèrent la cure par la parole. Imitant Freud, Zweig entend explorer les passions troubles, lever les tabous de l’inceste et de l’homosexualité. Mais le succès de ses œuvres lui paraît injustice et malentendu.
Pessimisme et désespoir
Romain Rolland échoue à lui faire combattre politiquement le nazisme : Zweig cède au pessimisme et à la nostalgie. Le Bouquiniste Mendel (Buchmendel), Rachel contre Dieu (Rachel rechtet mit Gott) renvoient à son monde juif menacé, tandis que Le Monde d’hier (Die Welt von gestern, 1942) embrasse l’histoire de l’Europe de 1895 à 1941, de l’âge d’or de la Vienne du début de siècle à l’effondrement de la civilisation que signe l’avènement de la barbarie nazie. La Pitié dangereuse (Ungeduld des Herzens, 1938) avait montré le « meurtre par pitié ». Exilé définitivement à Londres (1935) puis au Brésil, séparé de Friderike, sa collection dispersée, Zweig assiste désarmé à l’effondrement de son identité ; tel Kleist, il conclut un pacte de suicide avec sa seconde femme, quelques mois après avoir écrit une dernière nouvelle, Le Joueur d’échecs (Schachnovelle, 1941), métaphore du combat de l’humanisme contre le nazisme.
Citations choisies de Stefan Sweig
- Presque toujours, la responsabilité confère à l’homme de la grandeur. (Fouché)
- L’unique droit qui reste à un homme n’est-il pas de crever comme il veut… (Amok)
- Pour pouvoir aider les autres, il faut avoir soi-même ce sentiment que les autres ont besoin de vous. (Amok)
- Toute vie qui ne se voue pas à un but déterminé est une erreur. (Vingt-quatre heures de la vie d’une femme)
- J’ai personnellement plus de plaisir à comprendre les hommes qu’à les juger. (Vingt-quatre heures de la vie d’une femme)
- Vieillir n’est, au fond, pas autre chose que n’avoir plus peur de son passé. (Vingt-quatre heures de la vie d’une femme)
- Les idées n’ont pas véritablement de patrie sur terre, elles flottent dans l’air entre les peuples. (Correspondance)
- La raison et la politique suivent rarement le même chemin. (Marie Stuart)
- Il est rare que la vérité rattrape le terrain perdu sur la légende. (Amerigo)
- Rien ne trouble plus puissamment quelqu’un que la réalisation subite de son ardent désir. (La Confusion des sentiments)
- Il y a certaines paroles qui ne sont d’une vérité profonde qu’une seule fois. (La Confusion des sentiments)
- La pause, elle aussi, fait partie de la musique. (La Confusion des sentiments)
- Qu’est-ce qu’un serment ? Un mot, emporté par le vent. (Thersite)
- Que me sont des trésors, comparés à la lumière du soleil et à des heures vécues en plein bonheur ? (Thersite)
- On peut se sacrifier pour ses propres idées, mais pas pour la folie des autres. (La Contrainte)
- Il ne sert à rien d’éprouver les plus beaux sentiments si l’on ne parvient pas à les communiquer. (Clarissa)
- Les hommes sont surtout fascinés par ce qui est le plus éloigné d’eux. (Clarissa)
- Avoir peur, c’est mourir mille fois, c’est pire que la mort. (Clarissa)
- L’organisation émane des grands esprits, l’humain procède des petits. (Clarissa)
- Vouloir jouer aux échecs contre soi-même est aussi paradoxal que vouloir marcher sur son ombre. (Le Joueur d’échec)
- Mais n’est-ce pas déjà l’insulter injurieusement que d’appeler les échecs un jeu ? (Le Joueur d’échec)
Bibliographie sélective
Poésie
- Cordes d’argent, Berlin, 1901 (Silberne Saiten).
- Les Couronnes précoces, 1906 (Die frühen Kränze).
- La Vie d’un poète : Poèmes et écrits sur la poésie, 2021.
Romans et nouvelles
- La Confusion des sentiments, 1927.
- Amok ou le Fou de Malaisie, 1922.
- Vingt-quatre Heures de la vie d’une femme, 1927.
- La Peur, 1925.
- Le Voyage dans le passé, 1929.
- Le Jeu dangereux, 1931.
- Le Chandelier enterré, recueil, 1937.
- Le Joueur d’échecs, 1943.
- La Vieille Dette, 1951.
- Clarissa, roman inachevé, 1981.
Théâtre
- Thersite. Tragédie en trois actes (Tersites. Ein Trauerspiel in drei Aufzügen, 1907).
- La Maison au bord de la mer (Das Haus am Meer. Ein Schauspiel in zwei Teilen, 1911).
- Le Comédien métamorphosé. Un divertissement du Rococo allemand (Der verwandelte Komödiant. Ein Spiel aus dem deutschen Rokoko, 1913).
- Jérémie. Drame en neuf tableaux (Jeremias. Eine dramatische Dichtung in neun Bildern, 1916).
- Légende d’une vie (Legende eines Lebens. Ein Kammerspiel in drei Aufzügen, 1919).
- Volpone (Ben Johnson’s Volpone. Eine lieblose Komödie in drei Akten, 1925).
- L’Agneau du pauvre. Tragicomédie en trois actes (Das Lamm des Armen. Tragikomödie in drei Akten, écrite 1929, créée 1930).
Essais et biographies
- Émile Verhaeren : sa vie, son œuvre (Emile Verhaeren, 1910).
- Souvenirs sur Émile Verhaeren (Erinnerungen an Emile Verhaeren, 1917).
- Romain Rolland : sa vie, son œuvre (Romain Rolland : der Mann und das Werk, 1921).
- Trois Maîtres : Balzac, Dickens, Dostoïevski (Drei Meister : Balzac, Dickens, Dostojewski, 1921).
- Trois poètes de leur vie : Stendhal, Casanova, Tolstoï (Drei Dichter ihres Lebens: Casanova, Stendhal, Tolstoi, 1928).
- Marie-Antoinette (Marie Antoinette, Bildnis eines mittleren Charakters, 1932).
- Érasme, Grandeur et décadence d’une idée (Triumph und Tragik des Erasmus von Rotterdam, 1934).
- Marie Stuart (Maria Stuart, 1935).
- Balzac, le roman de sa vie (Balzac. Roman seines Lebens, publ. posth. 1946).
Article connexes
- Auteurs français. – Auteurs francophones. – Auteurs étrangers.
- Genres littéraires » La nouvelles. – Le roman. – La poésie. – Le théâtre.
- L’essai. – La biographie.
- L’épopée. – Le genre pastoral. – L’élégie. – L’épigramme.
- Rhétorique et style » La rhétorique.
Suggestion de livres
Le Monde d’hier | Marie-Antoinette | La Confusion des sentiments | L’Âme humaine |
La Pitié dangereuse | I. Romans et nouvelles | II. Romans, nouvelles et théâtre | III. Essais |