Gustave Flaubert : Madame Bovary

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Madame Bovary (1857)

– Gustave Flaubert –

[…] la parole humaine est comme un chaudron fêlé où nous battons des mélodies à faire danser les ours, quand on voudrait attendrir les étoiles.

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(Gustave Flaubert, Madame Bovary)

Introduction

Madame Bovary : Mœurs de province, couramment abrégé en Madame Bovary, est un roman de Gustave Flaubert paru en 1857 chez Michel Lévy frères, après une pré-parution en 1856 dans le journal La Revue de Paris. Il s’agit d’une œuvre majeure de la littérature française et mondiale.

Un premier grand roman

Portrait de Gustave Flaubert.Après avoir déjà exercé sa plume sur plusieurs ouvrages qui ne le satisfont pas et qu’il ne publie pas, Flaubert concentre sa puissance créatrice sur ce roman dont l’idée lui est donnée par la mort d’un ancien élève de son père, médecin normand, dont la femme, infidèle, s’était suicidée. La rédaction dure cinq ans, tant les exigences esthétiques de l’auteur sont fortes. Le livre donne lieu à un procès retentissant : Flaubert est accusé d’avoir porté atteinte aux bonnes mœurs en peignant la femme adultère. Le procès sera gagné et le succès de librairie est énorme (quatre éditions en quinze ans).

Vers une rhétorique de la transgression
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Gustave Flaubert, Madame Bovary (Texte abrégé), Livre de Poche Jeunesse, 2012, 320 p.Fille d’un riche paysan, Emma aspire à une vie pleine de passions dignes des romans sentimentaux qu’elle a lus au couvent. Dans cet espoir, elle épouse Charles Bovary, médecin à Tostes en Normandie, mais elle déchante bien vite. L’ennui est son lot quotidien.

Pour dissiper sa mélancolie, le couple s’installe à Yonville, bourgade plus importante où ils compteront parmi les notables, entre l’ambitieux pharmacien, Homais, le curé Bournisien, le notaire et son jeune clerc, Léon Dupuis. La naissance d’une petite fille ne lui procure pas plus le bonheur espéré et Emma se laisse bercer par les regards langoureux du jeune Léon. Ce n’est qu’après le départ de celui-ci qu’elle connaît enfin la passion tant attendue. Un riche propriétaire des environs, Rodolphe Boulanger, en fait sa maîtresse et elle se jette avec fougue dans l’amour adultère. Elle pousse toutefois son mari à accomplir l’opération chirurgicale inédite d’un pied-bot mais celle-ci échoue. Le mépris d’Emma pour son mari est alors sans appel et elle échafaude un plan pour fuir avec son amant. Ce projet romanesque ne plaît guère ou effraye celui-ci, qui l’abandonne.

Désespérée, elle sort de sa léthargie grâce à Léon, retrouvé par hasard à Rouen. Cette deuxième liaison la pousse à contracter dette sur dette auprès d’un marchand faussement compatissant, Lheureux. Celui-ci, pour recouvrer son argent, menace de la faire saisir mais Emma se suicide avant une telle déchéance. Charles assiste impuissant à son agonie et à son propre déclin. Il meurt de chagrin, non sans avoir pardonné.

Entre réalisme et naturalisme

L’œuvre constitue un tournant fondamental pour le genre romanesque, « une révolution dans les Lettres », écrit Maupassant.

Le réalisme y connaît un traitement spécifique conduisant au naturalisme : cadre et anecdote sont fournis par la réalité qu’un travail d’enquête et de documentation ne cesse d’explorer pour glaner les détails sur lesquels s’arrête l’écriture. L’univers dans lequel sont campés les personnages et, par delà, la « vie elle-même » sont ainsi rendus sensibles.

Toutefois, l’action n’évolue guère, à l’image de la vie de l’héroïne : elle est répétitive malgré les changements, les rebondissements apparents. L’écrivain aspirant à une « refonte plastique de la vie par l’art » (lettre à Louise Colet), l’intensité de l’œuvre vient du style passé par l’épreuve du « gueuloir » : chaque phrase est préalablement « gueulée » afin qu’elle soit apte à « rentrer dans l’idée comme un coup de stylet » (Lettre à Louise Colet). Ainsi, si le narrateur-auteur n’apparaît plus en tant que tel dans le corps du texte, s’il ne livre plus explicitement son opinion et adopte la position froide et distante de l’observateur, il n’en demeure pas moins présent derrière ce style et l’ironie terrible qu’il véhicule. Pas une phrase où l’écriture ne vienne détruire dans le même temps qu’elle les énonce les illusions des personnages.

→ Courants littéraires : Le Réalisme. – Le Naturalisme.

Le bovarysme

Le narrateur s’efface derrière ses personnages pour épouser leur point de vue, ce qu’ils voient, ce qu’ils rêvent. Mais ce « réalisme subjectif » (M. Raimond) qui saisit tantôt la pensée d’Emma, tantôt celle de ses amants ou des autres personnages, en dévoile aussi les soubassements médiocres. Pas un personnage pour en sauver un autre dans cette œuvre où l’acharnement de l’auteur n’a de cesse d’épingler le « bovarysme » du monde bourgeois qu’il dépeint. Flaubert dénonce ainsi cette tendance des hommes à se croire tels qu’ils voudraient être et à n’agir que selon les idées préconçues, reçues, qu’ils se font du monde. Emma croit atteindre par l’adultère le monde romanesque que ses lectures lui ont mis en tête : elle « retrouv[e] dans [celui-ci] les platitudes du mariage » mais elle n’en continue pas moins à « écrire des lettres amoureuses, en vertu de cette idée, qu’une femme doit toujours écrire à son amant » (III, 6).

La vie d’Emma est pitoyable : victime consentante des illusions forgées depuis l’enfance, elle est broyée par un univers social où règne l’ambition froide et calculatrice. Une pléiade de personnages, Homais, Lheureux, Léon, tissent autour d’elle les filets de leur réussite sociale. À leur ambition bourgeoise, qui sera ironiquement satisfaite, s’oppose finalement Charles, l’époux médiocre, qui, par son désespoir ultime, atteint au sublime que sa femme désirait.

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L’œuvre a connu diverses adaptations cinématographiques, dont celle de Vincente Minnelli, en 1949, et celle de Claude Chabrol, en 1991.

→ À lire : Le point de vue dans un récit. – Les personnages.

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