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Les courants littéraires
Sommaire
Une œuvre littéraire peut être appréciée pour elle-même. Mais on la comprend mieux quand on la situe dans son époque, et notamment dans son contexte culturel. Par sa langue, par ses valeurs et par ses idées, elle se rapproche d’autres œuvres au sein d’un même mouvement.
Qu’est-ce qu’un courant littéraire ?
Des valeurs communes
Un courant littéraire (ou un mouvement littéraire) s’affirme par des principes et des idées qui le distinguent des autres courants.
Pour le Romantisme (au XIXe siècle), selon Baudelaire, ces valeurs sont « la spiritualité, l’aspiration vers l’infini, le rêve, le sens de la couleur ». Pour le Classicisme (au XVIIe siècle), c’étaient l’harmonie, la simplicité, le naturel. Pour le Naturalisme (à la fin du XIXe siècle), ce seront la science, l’observation, non le rêve mais la réalité.
À l’intérieur d’un même mouvement, les écrivains partagent des options esthétiques (une même conception du style, de l’art, du beau) et idéologiques (une même conception de la vérité, de la société, de la liberté, etc.).
Un dialogue entre les arts
Un mouvement littéraire s’intègre le plus souvent dans un mouvement culturel plus large, qui touche la vie artistique et intellectuelle dans son ensemble. Le Romantisme s’impose dans les domaines de la peinture (avec Delacroix) et de la musique (avec Berlioz), et pas seulement dans les genres littéraires.
Une dimension internationale
La plupart des grands mouvements littéraires et culturels ne se développent pas seulement en France, mais dans toute l’Europe. C’est le cas, au XIXe siècle, du Romantisme, dont Baudelaire évoque les liens avec le Nord. L’Humanisme au XVIe siècle, les Lumières au XVIIIe siècle, le Réalisme au XIXe siècle, ont une dimension européenne.
Il existe cependant une exception française : le Classicisme, qui correspond à l’affirmation d’une identité culturelle nationale sous Louis XIV et s’oppose au Baroque dominant.
Comment un courant se fait-il connaître ?
Par une communauté d’écrivains et d’artistes
La dimension collective du mouvement littéraire se manifeste à travers :
- des ouvrages communs (comme l’Encydopédie pour les « philosophes » du XVIIIe siècle) ;
- des revues (comme La Révolution surréaliste dans les années 1920) ;
- des cénacles (cercles d’écrivains à l’époque romantique) ou des réunions régulières (comme à Médan, autour de Zola, à l’époque du Naturalisme).
Par des textes fondateurs
Un mouvement s’affirme par des textes qui définissent sa spécificité (préfaces, manifestes, essais, œuvres majeures, etc.). On peut citer par exemple Défense et illustration de la langue française (1549) de Du Bellay, qui présente les idées nouvelles du groupe de la Pléiade ; Le Roman expérimental (1880) de Zola, qui expose les thèses du Naturalisme ; ou encore les Manifestes du surréalisme (1924 et 1929) d’André Breton.
Hugo définit l’esthétique romantique dans ses préfaces (des Odes et ballades en 1826 ; de Cromwell en 1827) ; il la fait connaître aussi par son théâtre (la représentation d’Hernani, en 1830, tourne à la « bataille » contre les partisans de la tradition) ; et il proclame dans ses poèmes l’idéal romantique du poète « mage » et « prophète ».
Par des formes dominantes
Chaque mouvement cultive un genre littéraire privilégié :
- le Classicisme porte à la perfection l’art de la tragédie (Corneille, Racine) ;
- les Lumières explorent toutes les possibilités de la prose argumentative : essais, dialogues, contes philosophiques (Montesquieu, Voltaire, Rousseau, Diderot) ;
- le Romantisme s’épanouit dans la poésie lyrique, et imagine dans le drame un dépassement de l’opposition entre tragédie et comédie ;
- le Réalisme et le Naturalisme donnent tout leur essor aux genres narratifs (Balzac, Zola, Maupassant), tandis que le Symbolisme au contraire, dans la deuxième moitié du XIXe siècle, entend remettre la poésie au premier plan (Mallarmé).
Par son nom
Un mouvement littéraire reçoit rarement dès son époque le nom que lui donnera la postérité. Le mot « classicisme » apparaît vers 1820 chez les adversaires du Romantisme, longtemps après l’époque, le XVIIe siècle, dont ils se veulent les héritiers. Le mot « réalisme » naît pour désigner un projet littéraire, vers 1850, au moment où meurt Balzac.
À l’inverse, les naturalistes et les surréalistes ont revendiqué et précisé eux-mêmes l’étiquette par laquelle on les désigne.
Ces appellations ont pris aujourd’hui un sens plus large, au-delà d’une période délimitée, pour caractériser un style, un tempérament : baroque peut s’appliquer à une œuvre caractérisée par le désordre et la démesure ; classique, au contraire, peut qualifier un texte sobre et clair, ou encore tout chef-d’œuvre consacré par la tradition ; romantique se dit de l’exaltation lyrique de la nature, de la soif d’absolu…
Les mouvements dans l’Histoire
La succession des mouvements
Les grands mouvements littéraires et culturels se succèdent dans le temps, selon des périodes que l’on peut dater: l’Humanisme au milieu du XVIe siècle (1530-1570); le Baroque vers 1570-1650; le Classicisme de 1650 à 1700; les Lumières de 1720 à 1770 ; le Romantisme de 1820 à 1850 (pour la France) ; le Réalisme et le Naturalisme de 1830 à 1890; le Surréalisme vers 1920-1940, à la suite du mouvement Dada né en 1916.
Le Naturalisme, qui prolonge le Réalisme dans les années 1870-1890, succède effectivement au romantisme : Zola conteste à Hugo le droit d’incarner le siècle après la fin du Romantisme. L’école naturaliste, vers 1880, ne règne pas seule sur le monde des lettres : chaque époque, plusieurs sensibilités, plusieurs tendances coexistent.
L’opposition des mouvements
L’histoire des mouvements littéraires est faite de conflits, de querelles parfois vives : chaque nouvelle esthétique, pour se faire reconnaître, doit souligner sa différence.
- Le Classicisme s’affirme comme école du bon goût et du naturel, opposés aux excès et aux artifices du Baroque.
- Le Romantisme oppose la liberté et l’imagination aux principes classique : de l’imitation, qui ont encore leurs partisans au début du XIXe siècle.
- Le Réalisme, dans le roman, entend montrer la société réelle, sans les embellissements idéalistes du Romantisme ; mais les romanciers considérés comme fondateurs du Réalisme, Stendhal et Balzac, sont aussi représentatifs de la génération romantique de 1830.
- Le courant de l’Art pour l’Art, qui voit le jour avec les poètes parnassiens vers 1850, rejette par son formalisme l’idée romantique d’une fonction sociale de la littérature, mais aussi une certaine vulgarisation de la pratique littéraire chez les réalistes.
Il ne faut donc pas réduire une grande œuvre au mouvement dont elle serait l’illustration : un auteur peut évoluer d’un mouvement à l’autre, ou échapper à toute école. Mais les groupes d’écrivains jouent un rôle important dans le débat qui anime la vie culturelle autant que dans la relecture et l’interprétation des mouvements du passé
Gros plan sur les courants littéraires
XVe siècle
◾ Le dandysme et le décadentisme
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