André Malraux

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André Malraux

1901 – 1976

André Malraux, né le 3 novembre 1901 dans le 18e arrondissement de Paris et mort le 23 novembre 1976 à Créteil (Val-de-Marne),  est écrivain et homme politique français, dont l’œuvre s’apparente à une vaste réflexion sur la possibilité d’échapper à la « condition humaine ». Le 23 novembre 1996, pour le vingtième anniversaire de sa mort, les cendres de Malraux qui sont transférées au Panthéon.

Débuts d’un aventurier

Né à Paris, Georges-André Malraux est élevé par sa mère et sa grand-mère qui tiennent un commerce à Bondy. Il abandonne ses études avant le baccalauréat pour vivre du commerce des livres rares, mais continue à se former en suivant notamment des cours à l’École des langues orientales, tout en fréquentant les milieux littéraires et artistiques.

André Malraux en 1974 (photographie de Roger Pic)Il publie à cette époque des articles et des livres d’inspiration surréaliste : Lunes en papier (1921), suivi de Royaume farfelu (1928). Il y développe une veine d’humour fantaisiste qui affleure encore dans le reste de son œuvre (avec, par exemple, le personnage de Clappique dans La Condition humaine et les Antimémoires).

En 1923, il se rend en Indochine en compagnie de sa première femme, Clara, pour une expédition archéologique. Arrêté pour avoir dérobé des statues dans un site archéologique khmer à l’abandon, il est acquitté grâce au soutien des intellectuels et des artistes français. Revenu au Cambodge dès 1925, sensibilisé aux problèmes de la colonisation, il prend part à la lutte que mènent les révolutionnaires annamites ; dans les journaux éphémères qu’il fonde successivement avec Paul Monin (L’Indochine ; L’Indochine enchaînée), il dénonce les exactions dont est victime la population. À son retour à Paris en 1926, il se lie avec André Gide, qui le fait entrer comme directeur artistique chez Gallimard (1928).

Premiers romans

De ces expériences en Asie naissent un essai, écrit sous forme de dialogue, La Tentation de l’Occident (1926) et trois romans, Les Conquérants (1928), La Voie royale (1930) et La Condition humaine (1933). Ce dernier ouvrage lui vaut de remporter le prix Goncourt et d’être reconnu sur le plan international.

La Voie royale raconte, en la transposant sur le plan de la fiction, l’aventure tragique de son expédition de pillage archéologique, tandis que les deux autres romans évoquent les mouvements révolutionnaires qui déchirent la Chine contemporaine (grève générale des débuts de la révolution en 1925, répression d’une insurrection à Shanghai en 1927). Mais, au-delà d’une écriture qui évoque le reportage par son style abrupt et le cinéma par la construction des séquences, l’essentiel de l’œuvre réside dans « l’élément pascalien ».

Comme chez Dostoïevski, chaque personnage des récits de Malraux représente une manière possible d’affronter la condition humaine : comment, en effet, donner un sens à sa vie quand on est confronté à un monde dépourvu de sens (à ce que Malraux appelle l’« absolue réalité de la mort ») ? La mort, l’humiliation et l’oppression rendent le monde tragiquement absurde, de même que la crise d’un Occident qui a, certes, réussi dans sa volonté de puissance mais qui, après la « mort de Dieu », a échoué à trouver de nouvelles valeurs.

Les personnages de Malraux en qui s’unissent « la culture, la lucidité et la capacité à l’action » cherchent la « grande action quelconque » qui les rendra « un moment maître de leur destin ». Ils la trouvent dans l’aventure dangereuse de l’expédition exotique ou de l’action révolutionnaire pensée comme défi individuel ou fraternité virile.

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Écrivain et homme d’action anti-fasciste

De retour en Europe, Malraux se mobilise contre la montée du fascisme et du totalitarisme. Il participe aux mouvements d’intellectuels antifascistes, publie Le Temps du mépris (1935) et apporte en Allemagne une pétition en faveur du militant bulgare Dimitrov, injustement accusé d’avoir provoqué l’incendie du Reichstag. Il s’engage bientôt aux côtés des républicains dans la guerre d’Espagne, fondant l’escadrille España dès les premiers jours du conflit.

Dans l’ardeur de l’action, il conçoit un vaste roman épique, L’Espoir (1937), où il rapporte son expérience sur le mode épique et lyrique, mais dans un style à la fois journalistique et cinématographique. Il réalise lui-même pour le cinéma une adaptation libre de la fin de ce roman (Sierra de Teruel, 1938-1939).

L’Espoir reprend la méditation et les thèmes des romans antérieurs de Malraux, ainsi que sa réflexion sur la valeur de l’art. Cependant, l’action individualiste, incarnée par les anarchistes, est mise ici au second plan, au profit de la fraternité des hommes et surtout de la préoccupation d’efficacité, incarnée par les communistes : au-delà de l’« illusion lyrique », ces derniers ont conscience qu’il faut « organiser l’apocalypse ». Ainsi, L’Espoir est à la fois un roman d’aventure virile, un documentaire publié « à chaud », un essai philosophique et un roman de propagande communiste.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, volontaire pour servir dans les chars en 1940, Malraux est capturé par les Allemands. Il parvient, cependant, à s’évader et entreprend, dans sa retraite, la rédaction de deux romans qu’il n’achève pas (Le Règne du Malin ; Le Démon de l’absolu). Entré dans la Résistance en 1943 sous le pseudonyme de colonel Berger, il est arrêté et miraculeusement relâché par la Gestapo en 1944, après quoi il participe activement à la libération du territoire, à la tête de la brigade Alsace-Lorraine.

Malraux et de Gaulle

Nommé membre du Gouvernement provisoire de la République française en tant que ministre de l’Information, Malraux devient un soutien fidèle du gaullisme. Il quitte le pouvoir en même temps que le général de Gaulle, qui le rappelle en 1958 pour lui confier le ministère des Affaires culturelles. Attaché à ce poste jusqu’en 1969, il mène une politique de démocratisation et de décentralisation culturelle, créant notamment les premières Maisons des jeunes et de la culture et attachant son nom à la loi dite « loi Malraux » sur la protection et la restauration des monuments historiques dans les secteurs sauvegardés (1962).

« L’art est un anti-destin »

Pour Malraux, son activité de ministre des Affaires culturelles reste indissociable de sa méditation sur l’art et sur l’Homme : entamée avec Les Noyers de l’Altenburg (1943), cette réflexion se prolonge dans les ouvrages dédiés à la littérature et dans ceux, nombreux, qu’il consacre à l’art, parmi lesquels La Psychologie de l’art, qui comprend Le Musée imaginaire (1947), La Création artistique (1948) et La Monnaie de l’absolu (1949), textes réédités sous le titre Les Voix du silence (1951). Il est également l’auteur de Saturne, essai sur Goya (1950) et de La Métamorphose des dieux (1957).

Ces livres n’ont pas pour objet l’histoire de l’art ou l’esthétique mais bien la « signification que prend la présence d’une éternelle réponse à l’interrogation que l’homme pose à sa part d’éternité lorsqu’elle surgit dans la première civilisation, consciente d’ignorer la signification de l’homme ». Ils ne font ainsi qu’approfondir ce que disaient déjà les romans : Malraux appelle destin ce qui s’impose à l’Homme et le prive de valeur et de sens. L’aventure étant devenue impossible dans un monde entièrement connu, le « mythe marxiste » étant détruit, l’art seul semble pouvoir remplacer les anciennes valeurs religieuses perdues : c’est en ce sens que, pour Malraux, « l’art est un anti-destin ».

→ À lire : Qu’est-ce que l’art ? + 📽 Vidéo.

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Les Antimémoires

Malraux n’écrit pas des mémoires pour consigner les traces insignifiantes de son destin individuel mais des Antimémoires (1967) où se mêlent — dans un vaste ensemble qui n’est pas sans évoquer À la recherche du temps perdu de Marcel Proust — récits fictifs, vrais et faux souvenirs, méditations. Il publie aussi un ouvrage de souvenirs et de réflexions, à partir de ses divers entretiens avec le général de Gaulle (Les Chênes qu’on abat, 1971).

Après la démission de ce dernier, Malraux abandonne ses fonctions et ses activités politiques pour se retirer dans les environs de Paris, où il continue à écrire jusqu’à sa mort, survenue le 23 novembre 1976. Ses cendres sont transférées au Panthéon le 23 novembre 1996.

📽 20 citations choisies d’André Malraux
  • La pire souffrance est dans la solitude qui l’accompagne. (La Condition humaine, 1933)
  • Ce que l’esprit voit le cœur le ressent. (La Condition humaine, 1933)
  • Un homme est la somme de ses actes, de ce qu’il fait, de ce qu’il peut faire. Rien d’autre. (La Condition humaine, 1933)
  • Il n’y a pas de héros sans auditoire. (L’Espoir, 1937)
  • La mort n’est pas une chose si sérieuse ; la douleur, oui. (L’Espoir, 1937)
  • Être aimé sans séduire est un des beaux destins de l’homme. (L’Espoir, 1937)
  • Il n’y pas cinquante manières de combattre, il n’y a en qu’une, c’est d’être vainqueur. (L’Espoir, 1937)
  • La sagesse est plus vulnérable que la beauté ; car la sagesse est un art impur. (L’Espoir, 1937)
  • La vérité d’un homme c’est d’abord ce qu’il cache. (Antimémoires, 1967)
  • Le monde de l’art n’est pas celui de l’immortalité, c’est celui de la métamorphose. (Antimémoires, 1967)
  • Le musée transforme l’œuvre en objet. (La Métamorphose des dieux, 1957)
  • Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut une vie. (Les Conquérants, 1928)
  • On ne voit vieillir que les autres. (Les Chênes qu’on abat, 1971)
  • Le pouvoir doit se définir par la possibilité d’en abuser. (La Voie royale, 1930)
  • La jeunesse est une religion dont il faut toujours finir par se convertir. (La Voie royale, 1930)
  • La culture ne s’hérite pas, elle se conquiert. (Hommage à la Grèce, 1959)
  • La Joconde sourit parce que tous ceux qui lui ont dessiné des moustaches sont morts. (La Tête d’obsidienne, 1974)
  • L’art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort ; le musée est le seul lieu du monde qui échappe à la mort. (La Tête d’obsidienne, 1974)
  • Le musée est un des lieux qui donnent la plus haute idée de l’homme. (Le Musée imaginaire, 1947)
  • Le tombeau des héros est le cœur des vivants. (Oraisons funèbres, 1971)
Bibliographie sélective
  • 1920 : Des origines de la poésie cubiste (article dans La Connaissance, puis dans Action).
  • 1921 : Lunes en papier.
  • 1922 : Des lapins pneumatiques dans un jardin français, texte farfelu.
  • 1924 : Écrit pour une idole à trompe textes farfelus donnés en revues et repris dans les Œuvres complètes, vol.1, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade.
  • 1925 : L’Indochine, journal qu’il réalise avec Paul Monin; puis après interruption devient : L’Indochine enchaînée, 25 éditoriaux, dernière parution le 24 février.
  • 1925 : L’Expédition d’Ispahan, en août sous le pseudonyme de Maurice Saint-Rose.
  • 1926 : La Tentation de l’Occident, chez Grasset.
  • 1927 : Écrit pour un ours en peluche (in-900) – Le voyage aux îles Fortunées (Commerce) – D’une jeunesse européenne dans le livre collectif intitulé : « Écrits », chez Gallimard.
  • 1928 : Les Conquérants, chez Grasset.
  • 1928 : Royaume-Farfelu, chez Gallimard.
  • 1930 : La Voie royale, chez Grasset, prix Interallié.
  • 1933 : La Condition humaine, chez Gallimard, prix Goncourt le 7 décembre 1933.
  • 1935 : Le Temps du mépris, chez Gallimard.
  • 1937 : L’Espoir et son premier texte sur La Psychologie de l’art.
  • 1938 : Espoir, sierra de Teruel, (mise en scène du film) qui sortira en 1945 en France sous le titre de L’Espoir.
  • 1941 : Le Règne du Malin, texte inachevé, publication posthume.
  • 1943-1948 : La Lutte avec l’ange, première partie, 1943, Éditions du Haut-Pays à Lausanne (la Gestapo aurait brûlé la suite du manuscrit) ; ce volume sera ensuite retitré Les Noyers de l’Altenburg, 1948, Gallimard, Paris.
  • 1946 : Le Démon de l’Absolu.
  • 1946 : Esquisse d’une psychologie du cinéma.
  • 1947 : Les Dessins de Goya au musée du Prado et Le Musée imaginaire, premier tome de La Psychologie de l’art.
  • 1948 : Le Rassemblement, hebdomadaire qu’il crée.
  • 1948 : La Création artistique.
  • 1949 : Liberté de l’esprit, revue du RPF qu’il crée et à laquelle il collabore, la direction est confiée à Claude Mauriac.
  • 1949 : La Monnaie de l’absolu, 3e volume de la Psychologie de l’art.
  • 1950-1978 : Saturne.
  • 1951 : Les Voix du silence, qui est une nouvelle version de La Psychologie de l’art.
  • 1952 : La Statuaire premier tome du Musée imaginaire de la sculpture mondiale, chez Gallimard.
  • 1954 : Des bas-reliefs aux grottes sacrées et Le Monde chrétien chez Gallimard.
  • 1957 : La Métamorphose des dieux.
  • 1967 : Antimémoires, (première partie du Miroir des Limbes).
  • 1971 : Les Chênes qu’on abat… (repris dans La Corde et les Souris).
  • 1971 : Oraisons funèbres (huit oraisons reprises dans Le Miroir des Limbes en 1976) — préface le livre Souvenir à Charles de Gaulle.
  • 1974 : La Tête d’obsidienne (repris dans La Corde et les Souris).
  • 1974 : Lazare (repris dans La Corde et les Souris).
  • 1974 : Le Surnaturel, La Métamorphose des dieux I (paru en 1957 sous le titre La Métamorphose des dieux).
  • 1975 : Hôtes de passage (repris dans La Corde et les Souris).
  • 1975 : L’Irréel, La Métamorphose des Dieux II.
  • 1976 : La Corde et les Souris (seconde partie du Miroir des Limbes).
  • 1976 : Le Miroir des limbes (constitué des volumes suivants : Antimémoires, La Corde et les Souris et Oraisons funèbres), publié en octobre dans la Pléiade.
  • 1976 : L’Intemporel, La Métamorphose des dieux III.

Articles connexes

Suggestion de livres


L’Espoir

La Condition humaine

Les Chênes qu’on abat

Le Musée imaginaire

André Malraux

Écrits sur l’art

La Condition humaine (fiche de lecture)

Écrits farfelus
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