Le drame bourgeois

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Le drame bourgeois

Qu’est-ce que le drame bourgeois ?

Le drame est un genre théâtral dont l’action généralement tendue et faite de risques, de catastrophes, comporte des éléments réalistes, familiers, selon un mélange qui s’oppose aux principes du Classicisme, aux XVIIIe et XIXe siècles. Le drame s’oppose à la tragédie et à la comédie classique.

Le drame bourgeois, appelé aussi tragédie populaire/domestique/bourgeoise, comédie larmoyante, drame domestique, et même genre sérieux (selon Denis Diderot), est un genre théâtral annoncé au XVIIe siècle par la tragi-comédie ou comédie héroïque, mais ne datant réellement que du XVIIIe siècle. Il a eu pour créateur Pierre-Claude Nivelle de La Chaussée. Après lui, il est cultivé et mis en vogue par Denis Diderot, Arnaud-Baculard, Beaumarchais et Louis-Sébastien Mercier.

Le drame bourgeois est la représentation des événements les plus funestes et des situations les plus malheureuses de la vie commune. Il se rapproche de la tragédie et de la comédie par le mélange des scènes tristes et gaies, ou par le ton uniformément sérieux qu’il garde quelquefois car il y a deux espèces, l’une qui ne se compose que d’un sujet sombre dont le dénouement se termine par le malheur ; l’autre qui varie son principal intérêt en y ajoutant des épisodes riants et dont le nœud pathétique se dénoue par le bonheur. Ce genre nouveau est introduit sur la scène dramatique par La Chaussée, vers 1732. Il met en scène des personnages qui sont issus de la bourgeoisie. Le drame bourgeois peut être en vers comme en prose.

Sur plusieurs points, le drame bourgeois a largement influencé le genre populaire du mélodrame au XIXe siècle.

→ À lire : Le drame. – La tragédie. – La comédie. – La comédie classique en France. – Le mélodrame.

Le drame bourgeois peut-il être intéressant ?

Tous les genres sont bons, hors le genre ennuyeux, a dit Voltaire ; et Marmontel remarque que celui-ci a son intérêt, son utilité et sa beauté. Pour l’intérêt, il est facile d’en donner au drame bourgeois. L’enfance, la vieillesse, l’infirmité dans l’indigence, la ruine d’une famille honnête, la faim, le désespoir sont des situations très touchantes. Une grêle, une inondation, un incendie, une femme et ses enfants prêts à périr ou dans les eaux ou dans les flammes sont des tableaux très pathétiques. Les hôpitaux, les prisons et la grève sont des théâtres de terreur et de compassion si éloquents par eux-mêmes, qu’ils dispensent l’auteur qui les met sous nos yeux d’employer une autre éloquence. Les malheurs domestiques, les
événements de la vie commune ont aussi l’avantage d’être plus près de nous, et, quoiqu’ils nous étonnent moins que les aventures des héros et  des rois, ils doivent nous toucher plus vivement, et être plus intéressants pour le plus grand nombre.

L’utilité du drame bourgeois

Le drame bourgeois peut offrir quelque utilité, lorsqu’à l’exemple de la tragédie, il place dans le cœur humain le ressort des événements et le mobile des actions. Que l’homme y soit malheureux par sa faute, en danger par son imprudence, jouet de sa propre faiblesse, victime de sa passion, ce genre,  avec moins de splendeur, de dignité, d’élévation que la tragédie, ne laissera pas que d’avoir la bonté poétique et la bonté morale. Mais le drame bourgeois est mauvais, parce qu’il ne présente ni intérêt, ni instruction, lorsqu’il roule sur des accidents dont l’homme est la victime sans en être la cause. Une calamité, un malheur domestique, un accident funeste qui vient d’une cause étrangère, ne prouve rien, n’instruit rien et n’avertit de rien. Le spectateur en est affligé, mais d’une tristesse stérile et par conséquent pénible.

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La beauté du drame bourgeois

Pour qu’un drame bourgeois soit beau, il faut que le sujet soit pathétique et moral, populaire et décent, qu’il n’ait rien de trivial ni de romanesque. La conduite de l’action doit être d’autant plus vive qu’elle n’est soutenue par aucun des prestiges de l’illusion théâtrale. Les mœurs bourgeoises et populaires y doivent être peintes sans grossièreté, sans bassesse, et pourtant avec l’air de la vérité. Le langage doit être simple, du ton de la chose et des personnages, mais correct, facile et pur, naïf, ingénieux, sensible, énergique lorsqu’il doit l’être, jamais forcé, jamais rampant, jamais plus haut que le sujet.

Le style du drame bourgeois

Le poète qui écrit comme on parle, écrit mal. La diction doit être naturelle, mais de ce naturel que le goût rectifie, où il ne laisse rien de froid, de négligé, de diffus, de plat, d’insipide. Le langage même du peuple a sa grâce et son élégance, comme il a sa bassesse et sa grossièreté. Il a ses tours ingénieux et vifs, ses expressions pittoresques, ses figures éloquentes. Il aura sans doute sa pureté, quand le choix sera fait avec discernement. Le drame est en vers ou en prose.

Les effets recherchés

D’après certains auteurs dramatiques modernes, on doit viser à produire des émotions par tous les moyens possibles. Tout, dans les arts, devrait concourir à ce qu’ils appellent l’effet, c’est-à-dire à l’illusion et à l’émotion la plus forte et plus l’illusion serait complète et le spectacle pathétique, plus il nous serait agréable, quelque moyen que l’on eût pris pour nous tromper et pour nous émouvoir, quand même on serait allé chercher le caractère de ses personnages dans les cours d’assises et jusque dans les bagnes.

Cette opinion peut être celle d’un peuple sans délicatesse, qui ne demande qu’à être ému. Mais pour un monde éclairé, cultivé, et doué d’organes sensibles, le plaisir de l’émotion dépend toujours des moyens qu’on emploie aussi fera-t-il peu de cas d’un drame qui, avec l’imitation et l’expression triviale de la douleur et de la plainte, avec des objets pitoyables, avec des cris, des armes, des sanglots, l’aura physiquement ému.

Ce qu’il faut retenir…

À partir du XVIIIe siècle, le public ne peut plus se satisfaire des grandes tragédies qui ne montrent que des princes défendant les valeurs héroïques désuètes. Les dramaturges présentent alors des pièces nouvelles. Ils varient les registres et le « sérieux » (c’est-à-dire un pathétique grave parfois larmoyant) remplace le tragique. Ils se tournent donc vers le drame bourgeois.

Avec le drame populaire ou bourgeois, les thèmes eux-mêmes changent : on ne craint plus le sort des États mais pour le bonheur d’une famille bourgeoise déchirée dans des conflits d’intérêts ou une naissance illégitime. Le drame bourgeois a donc une vocation moralisatrice. Pour être efficace, le message n’est plus déclamé comme l’étaient les anciennes tragédies, mais joué avec naturel et accompagné d’une gestuelle comme elle a été définie par Denis Diderot dans son essai Sur la Poétique dramatique (1759).

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Allant de ces principes, le drame bourgeois refuse l’unité de temps et de lieu (une des règles d’or de la tragédie française). Il accorde une grande importance à la vraisemblance puisqu’il vise à peindre les mœurs et à développer les caractères de la société bourgeoise. Il a un certain penchant pour le pathos et l’exagération. Il se situe entre la tragédie et la comédie, en insistant sur les problèmes économiques et la condition sociale, tout en célébrant le triomphe de la vertu sur le vice.

Du point de vue scénique, l’accent est mis sur les acteurs. Selon Diderot, il n’est pas naturel dans de grands moments d’émotions de réciter un texte lyrique. Il croit aux vertus de la pantomime, c’est-à-dire à l’action plutôt qu’aux paroles dans ces moments intenses. Enfin, les décors sont réalisés avec un grand souci de réalisme (perspective) et le plancher est légèrement incliné pour souligner la perspective.

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