La littérature française du Moyen Âge

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Histoire de la littérature française

Le Moyen Âge

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💡 La littérature française
La littérature française est l’ensemble des œuvres littéraires de langue française produites en France depuis le XIIe siècle, date à partir de laquelle se développe la littérature en langue vulgaire.
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Présentation

Alors que pour les historiens le Moyen Âge commence en 476 (date de la chute de l’Empire romain d’Occident) et s’achève en 1453 (date de la prise de Constantinople par les Turcs), le Moyen Âge littéraire débute tardivement — vers le début du XIIe siècle — pour s’achever à la fin du XVe siècle.

Le premier texte attesté en langue romane — ou vulgaire —, les serments de Strasbourg, date de 842, mais l’épanouissement de la littérature en langue vulgaire débute effectivement bien plus tard. Cet épanouissement va de pair avec des changements survenus dans les structures sociales et dans les mentalités du monde médiéval, marquant l’apogée des systèmes seigneurial et féodal. Il est lié notamment à l’émergence du concept de fin’amor (ou fine amor), qui va donner naissance à la littérature courtoise, et qui s’impose alors dans le sud de la France, avec les troubadours, puis dans le Nord, avec les trouvères, comme code et référence pour régir aussi bien les situations amoureuses que les actions chevaleresques et guerrières (notamment selon les schémas de l’aventure et de la quête).

La littérature médiévale se manifeste alors sous des formes diverses avec une grande vitalité. Antérieures à la littérature courtoise, les chansons de geste (attestées entre la fin du XIe siècle et le XIVe siècle, où elles disparaissent) sont le genre littéraire le plus ancien. Dans la seconde moitié du XIIe siècle apparaissent les romans courtois, qui supplantent progressivement les chansons de geste, étant davantage adaptés au raffinement croissant de la société aristocratique. Cependant, l’histoire, sous la forme des chroniques, se dégage peu à peu des formes romanesques pour devenir, aux XIIIe et XIVe siècles, un genre à part entière.

La poésie, alors chantée et accompagnée de musique, prend aussi son essor, avec les troubadours dans les pays de langue d’oc, et les trouvères dans les pays de langue d’oïl, pour s’y épanouir dans le lyrisme courtois, tandis que les formes dramatiques quittent progressivement la sphère du sacré. Une veine réaliste et paillarde, à visée satirique, représentée surtout par les fabliaux et les farces vient prendre le contre-pied des valeurs chevaleresques et courtoises.

Récits

La langue romane, dite aussi vulgaire par opposition au latin considéré comme la langue savante, est d’abord utilisée dans des textes hagiographiques ou historiques. Toutefois, la fiction s’en empare rapidement et lui emprunte son nom : le roman devient un genre à part entière. Ces récits médiévaux sont toutefois, contrairement à l’acception que recouvre aujourd’hui le terme de roman, le plus souvent composés en vers (en majorité des octosyllabes).

On distingue traditionnellement trois principales sources aux récits du Moyen Âge : le fonds de France, le fonds antique et le fonds de Bretagne.

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Fonds de France

Le fonds de France relate les hauts faits des grands seigneurs français : ce sont les chansons de geste. Ces épopées en vers, de longueur variable, sont regroupées en « cycles » ou « gestes », c’est-à-dire en grands ensembles thématiques, organisés souvent autour d’un haut personnage et de sa famille.

Elles transposent librement les faits historiques en les magnifiant, et content surtout les exploits guerriers des souverains et des chevaliers chrétiens contre les Infidèles. Leurs auteurs, comme souvent au Moyen Âge, sont anonymes. Elles sont sans doute répandues, transformées et enrichies peu à peu par les jongleurs et les troubadours qui les chantent ou les miment dans les bourgs ou devant les seigneurs.

La Chanson de Roland (fin du XIe siècle) fait partie du cycle le plus ancien dit « de Charlemagne » ou encore « Geste du Roi », qui relate les exploits de Charlemagne, champion de la chrétienté, mais aussi de ses pairs et de ses chevaliers. Ce cycle est suivi du cycle « de Garin de Monglane », qui témoigne d’un affaiblissement du mythe impérial et dont le personnage principal est saint Guillaume d’Orange le Grand, dit « Guillaume au Court Nez ». Vient enfin le cycle « des Barons révoltés », dit aussi « Geste de Doon de Mayence », où les héros se rebellent contre l’ordre établi.

La Chanson de Roland, une illustration de Mary Evans Picture Library.

La Chanson de Roland, une illustration de Mary Evans Picture Library.

Fonds antique

Le fonds antique, appelé aussi « cycle classique », apparaît dans la seconde moitié du XIIe siècle. Il marque une étape transitoire entre l’exaltation guerrière des chansons de geste et la délicatesse des récits courtois à proprement parler.

Sensibles à la grandeur épique des œuvres antiques qu’ils viennent de redécouvrir, les clercs tendent à christianiser et à adapter aux valeurs médiévales les mythes païens, sans craindre l’anachronisme. Considéré comme le premier roman français de cette sorte, le Roman de Thèbes (v. 1150), adapté d’une épopée latine, est composé en langue d’oïl et en octosyllabes à rimes plates. L’œuvre la plus célèbre de ce fonds est néanmoins le Roman d’Alexandre, autre adaptation d’un texte antique, maintes fois remanié par divers auteurs entre 1130 et 1180.

Fonds de Bretagne

Le fonds de Bretagne, ou « matière de Bretagne », qui à l’origine se nourrit principalement du folklore et du merveilleux celtique, se rattache progressivement à l’émergence des valeurs courtoises, jusqu’à en représenter l’une des plus parfaites manifestations.

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Les romans courtois — nés sous l’influence de la poésie des troubadours chantant la fin’amor — proposent une nouvelle vision des relations sociales, fondées sur le respect que le chevalier doit à son seigneur et à sa Dame (le « service d’amour »).

Les premiers textes qui s’inscrivent dans le cycle arthurien — relatant les hauts faits du roi légendaire Arthur et de ses chevaliers — apparaissent vers le XIe siècle, c’est-à-dire à une époque antérieure à la courtoisie. La légende d’Arthur ne cesse plus dès lors d’être modifiée et étoffée de nouveaux épisodes (Geoffroi de Monmouth, Robert Wace), jusqu’à proposer, dans la seconde moitié du XIIe siècle, un des plus riches et des plus volumineux exemples de récit courtois ; les multiples versions du mythe de Tristan et Iseut, la quête du Graal et les amours de Guenièvre et Lancelot s’inscrivent progressivement dans ce cycle. Chrétien de Troyes, le plus grand « romancier » médiéval français, reprend ces mythes bretons en les christianisant et en leur conférant une dimension psychologique inédite.

Avec Jean Renart (fin du XIIe siècle-début du XIIIe siècle), les récits courtois se font plus réalistes : délaissant le merveilleux, ils décrivent avec précision les mœurs de la noblesse et la psychologie amoureuse (Roman de Guillaume de Dole, v. 1210).

Récits satiriques

En réaction contre la noblesse des personnages et le raffinement des situations que présentent les récits courtois, s’imposent les fabliaux, textes grivois très populaires. La veine satirique donne aussi le chef-d’œuvre du Roman de Renart, composé par plusieurs écrivains entre le XIIe et le XIIIe siècle : empruntant aux fabulistes l’idée de décrire les êtres humains sous les traits d’animaux, ce récit subversif dénonce les travers de la société du temps et parodie les récits courtois. Certains personnages, en particulier le héros, Renart le Goupil, restent aujourd’hui encore très populaires.

Récits allégoriques

Le Roman de la roseAvant d’être au service du divertissement, le roman d’alors a pour fonction première de véhiculer les valeurs de la « classe » dominante et une certaine représentation du monde. Il produit ainsi, dans la veine didactique et allégorique, le Roman de la Rose, chef-d’œuvre datant du XIIIe siècle.

Cette somme poétique de près de 22 000 vers, écrite pour sa première partie (4 000 vers environ) dans la première moitié du XIIIe siècle, a pour auteur Guillaume de Lorris : elle développe le récit courtois d’un songe où la Rose symbolise la Dame aimée et inaccessible. Laissée inachevée, cette première partie a été complétée par Jean de Meung dans la seconde moitié du siècle, mais dans une perspective très différente, puisque le roman cesse alors d’être un éloge de l’amour courtois pour devenir une somme encyclopédique traitant de savoir, de morale et de religion.

À la fin du XIVe siècle, l’invention romanesque semble s’essouffler. Le récit allégorique ne semble plus utilisé que pour authentifier la noblesse d’un lignage.

Chroniques

Les chansons de geste ont été longtemps le seul outil de connaissance des épisodes guerriers de l’histoire. Elles sont supplantées peu à peu par les chroniques, textes composés en prose, le plus souvent par un témoin direct des événements ; délaissant le recours au merveilleux, les chroniques donnent des faits une vision plus réaliste.

L’un des principaux auteurs de chronique est Geoffroi de Villehardouin, qui traite de la quatrième croisade avec un souci alors nouveau de contemporanéité. La notion de vérité historique se fait de plus en plus précise au XIVe siècle, et des écrivains de métier (n’ayant pas participé aux événements relatés) s’illustrent à leur tour dans le genre.

C’est avec Jean Froissart que la chronique acquiert ses lettres de noblesse : à côté des tournois et des combats spectaculaires, il mentionne dans ses chroniques les problèmes politiques et l’émergence de nouvelles « classes sociales ». Mais, au moment où les relations entre rois et seigneurs se compliquent, le besoin d’une nouvelle écriture se fait sentir : Philippe de Commynes, avec ses Mémoires (1488-v. 1498, publiés en 1524), écrit le premier livre d’histoire de l’âge moderne : il privilégie l’analyse à la description, ne se limite plus à un exposé chronologique et montre le souci nouveau de mettre les événements en perspective.

Poésie
Poésie courtoise

Un troubadour du XIIIe siècle.

Certainement influencée par la poésie arabe et par des rites préchrétiens, la poésie des troubadours du sud de la France — présents à la cour des comtes de Toulouse ou à celle d’Aliénor d’Aquitaine — est historiquement la première poésie composée en langue vulgaire (et non plus en latin). Elle instaure une conception de l’amour qui s’intègre au système des valeurs féodales, la fin’amor.

À côté de la « chanson », ou canso, le poème d’amour lyrique, les troubadours pratiquent en les adaptant des formes comme le sirventès (canso sirventes), qui illustrent l’autre grande veine de cette poésie, guerrière et satirique. Bertran de Born, seigneur de Hautefort en Périgord (v. 1140-v. 1215), qui écrit en satiriste et en moraliste, a recours à cette forme.

Guillaume IX d’Aquitaine, comte de Poitiers, est considéré comme le premier grand troubadour. À la cour d’Aliénor d’Aquitaine, petite-fille de Guillaume, se trouve Marie de France, à qui l’on doit un célèbre recueil de Lais reprenant la matière de Bretagne mais l’adaptant à son auditoire raffiné. C’est Aliénor d’Aquitaine elle-même qui contribue à faire passer la culture de langue d’oc, marquée par la fin’amor, au nord de la Loire, domaine de la langue d’oïl.

Au nord, la poésie courtoise est chantée par les trouvères, parmi lesquels Thibaud de Champagne — l’une des figures les plus représentatives du lyrisme courtois de la première moitié du XIIIe siècle. Le Parisien Rutebeuf, grand nom de la poésie française, compose, lui, une œuvre d’une grande variété, aux accents personnels. Renouvelant sa thématique, il rompt avec la tradition courtoise.

Renouvellement des formes poétiques

Portrait de François Villon.Durant les XIVe et XVe siècles se développent de nouvelles formes poétiques. Guillaume de Machaut, s’il reste fidèle aux thèmes courtois, se montre novateur sur le plan formel, tant dans le domaine musical que poétique. Il fixe en effet un certain nombre de formes comme les ballades, les rondeaux ou les virelais et crée le « dit », qui aborde des questions morales d’ordre général sous la forme de l’anecdote autobiographique. Héritière de Machaut, Christine de Pisan s’illustre dans des genres didactiques, mais c’est au lyrisme délicat de ses ballades qu’elle doit son renom.

La poésie du XVe siècle trouve ses maîtres avec Charles d’Orléans et François Villon. Charles d’Orléans est mécène — il instaure des concours poétiques et protège des artistes et des écrivains — en même temps que poète, et compose essentiellement des ballades et des rondeaux en restant fidèle à des thèmes courtois qu’il sait toutefois renouveler avec fraîcheur et simplicité.

Quant à François Villon, l’auteur de la Ballade des pendus, sa vie aventureuse en a fait un personnage mythique de poète-brigand. Détaché des valeurs courtoises, ce maître de la ballade utilise un style vivant, truculent, pour railler ses contemporains. Cette ironie ne doit pourtant pas faire oublier qu’il compose des poèmes d’une tonalité lyrique touchante, dans lesquels il évoque l’amour et la hantise de la mort. Le XVe siècle voit encore l’apparition des Grands Rhétoriqueurs, tels Jean Marot ou Jean Molinet, qui font de la poésie un jeu mondain et raffiné au point de la limiter parfois à une démonstration de virtuosité formelle, notamment en multipliant les figures de rhétorique.

Théâtre

C’est peut-être dans le cas du théâtre que le mouvement général de sécularisation de la littérature médiévale française est le plus sensible. C’est en effet à partir de la liturgie de la messe, peu à peu glosée en langue vulgaire puis accompagnée de véritables mises en scène, que naît le théâtre français.

D’abord représentés dans l’enceinte de l’église par des prêtres ou des moines, les drames liturgiques sont à l’origine interprétés en latin et visent à illustrer le culte. Rejetés à l’extérieur de l’église au milieu du XIIe siècle, ils sont dès lors représentés sur le parvis, tandis que la langue vulgaire éclipse le latin.

Les thèmes les plus courants de ces « jeux » (terme médiéval signifiant « drame ») sont naturellement extraits de la Bible (dans les pièces appelées miracles ou mystères) ou des représentations allégoriques à visée édifiante (dans les moralités). Les miracles, qui privilégient d’abord les épisodes bibliques, notamment la Passion du Christ (Le Mystère de la Passion d’Arnoul Gréban est considéré comme un chef-d’œuvre du théâtre du XVe siècle), prennent progressivement en compte toute l’Histoire sainte, en particulier la vie des saints (ainsi des jeux de Jean Bodel composés entre le XIIe et le XIIIe siècle), et s’ouvrent à des parenthèses profanes.

Des textes indépendants, d’inspiration mondaine, apparaissent alors sous forme d’intermèdes, comme les performances des jongleurs. Le Jeu de la feuillée et le Jeu de Robin et Marion, composés par Adam de la Halle dans la seconde moitié du XIIIe siècle, constituent les premières pièces de théâtre entièrement profanes.

Héritière des fabliaux et des scènes comiques qui viennent de plus en plus fréquemment alléger la représentation des mystères, la farce se développe au XIVe siècle et perdure jusqu’à la moitié du XVIe siècle, passant de l’état de texte bref servant d’intermède, à celui de pièce de théâtre à part entière, ancêtre de la comédie moderne. La Farce de maître Pathelin (v. 1465) constitue le chef-d’œuvre du genre.

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